La publication de ces deux ouvrages démontre, de la part des éditions du Québécois, beaucoup d’originalité et de conviction et assez peu de réalisme. Les deux auteurs mis à contribution traitent, en effet, de l’indépendance québécoise avec ferveur et détermination, mais leurs angles d’approche risquent de dérouter le lecteur au lieu de lui proposer un cheminement clair et simple vers leur commun objectif.
Géographe, JRM Sauvé reprend ici les propos qu’il tenait il y a vingt ans dans Géopolitique et avenir du Québec (Guérin, 1994). Comme à cette époque, il fait des caractéristiques exigeantes du climat et de la géographie du Québec non pas des motifs de dépression, mais des stimulants féconds. De façon étonnante et discutable, il juge que la survie d’une société distincte en terre de Caïn a été facilitée précisément par l’aspect rébarbatif de notre situation physique : les étrangers ont plié bagages et seules les âmes fortes – les nôtres – ont résisté. Les mêmes facteurs, écrivait-il alors en polémologue (?) qu’il est, rendent notre territoire moins attirant aux yeux des éventuels envahisseurs et constituent de ce fait un atout en notre faveur. En reprenant son argumentation dans Défense territoriale pour la nation et l’État du Québec, Sauvé ne change rien à ses perspectives. Il revient presque mot à mot aux treize principes de son ouvrage précédent : mélange de lieux communs et de conseils aussi généreux qu’éthérés. Il préfacera le bouquin de Yanick Barrette en évoquant sommairement la perspective républicaine qu’adopte son collègue, mais en insistant surtout sur sa propre thèse.
Quant à Yanick Barrette, la sympathie qu’on peut éprouver pour sa défense du républicanisme est mise à rude épreuve par l’ampleur donnée à des éléments historiques ou politiques qui ne sont que mollement rattachés au cœur de la proposition. Barrette a beaucoup lu et il trouve son miel dans d’innombrables ouvrages, mais il ne parvient pas toujours à styliser, à élaguer, à ramener la cible dans sa mire. Le temps l’aidera à digérer ses lectures copieuses, mais son écriture aura besoin d’autre chose.
Bouquins lourds de ferveur, mais qui ne rendront pas la cause indépendantiste plus séduisante. Sauvé raisonne comme si le Québec était un territoire tellement inhospitalier qu’il n’avait pas à redouter une invasion, Barrette comme si les choix républicains étaient d’une complexité extrême.
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