On sait sans doute que la poésie de Jean-Paul Daoust explore tout ce qui est fureur de vivre, à travers la vie nocturne urbaine. Nous connaissons, également, le dandysme de ce poète qui correspond à un mode de vie particulier, à une quête esthétique axée sur la qualité de la vie intérieure. Dans Les saisons de l’ange (Le Noroît, 1997), le « dandy urbain » fait place au « dandy angélique », en ce sens que tout le côté noir de notre existence se trouve transcendé par des images angéliques. L’écriture survole, à la manière des anges, la vie mais en évoquant notre difficulté d’être. C’est dire que ces images angéliques font partie d’un questionnement virulent de la condition humaine.
Dans les « nouvelles saisons », c’est une mise en question similaire qui s’exprime. L’évocation de la nature — rattachée aux différentes saisons — est encore une fois prétexte à une exploration existentielle. Le poète angélique, comme l’albatros baudelairien, peut survoler de très haut nos pauvres tourments mais, aussi, s’abattre bêtement. Jean-Paul Daoust écrit : « Moi je reste là / Un ange au sol / À me tourmenter de ma fêlure quotidienne ». Nos existences sont essentiellement souffrances, esseulements et folies. L’Ange, qu’il soit transcendant, terrestre ou trop humain, n’est qu’une figure de la Tristesse. Il n’apporte pas seulement la lumière mais aussi le trop lourd désespoir qui ne cesse de nous habiter. Anges ou humains, c’est l’agonie qui nous guette comme la mort nous hantant… C’est l’Art, finalement, qui peut nous ouvrir à un « Ailleurs » : « Dans les saisons de l’ange / Qui rêve les yeux ouverts / En proie au paradoxe des êtres / L’art offre ses ailes / À l’âme cloîtrée ».
Cette thématique de l’angélisme donne lieu à de très beaux vers souvent inspirés d’images poétiques venues de la sombre poésie du XIXe siècle : ne pensons qu’à Baudelaire, à Nerval et à Nelligan. Mais une certaine répétition de ces images agace, et les courtes citations qui ouvrent chacun des poèmes alourdissent une écriture tout de même maîtrisée.