La francophonie est un concept qui ratisse large, et c’est tant mieux. En font partie d’anciennes colonies, des pays membres du Commonwealth, d’autres dont une partie infime de la population connaît le français, un peu de tout quoi ! Et ça fait peur à certains qui voient là un risque pour la francophonie de diluer son essence même.
Jean-Marie Borzeix, conseiller à la présidence de la Bibliothèque nationale de France et président des Francophonies en Limousin, se met à rêver et nous offre ses carnets de la francophonie. On a bien aimé parce qu’il n’y a pas de morosité, qu’il y a une grande clarté et que l’auteur n’est pas enfermé dans son Limousin ou dans sa France, mère de tous les francophones. Les Québécois sont présents et les Africains, les Asiatiques, les jeunes, les plus vieux, les Académiciens et le peuple. Et c’est plus que bien. Il y est aussi question de la présence du français dans Internet, de la loi 101 qui a sorti le Québec de l’écheveau linguistique, des centres culturels français qui sont victimes, comme l’écrit l’auteur, de coupes claires dans leurs budgets, de la menace de l’anglais et de la place du français qui diminue peu à peu dans une Europe presque unie (« Cela tient aussi à l’indifférence désinvolte, à la discrétion ou à la démission pure et simple de nombreux représentants français. »). On pourrait citer Airbus et d’autres compagnies françaises, dont la langue officielle est l’anglais, ou certaines campagnes publicitaires d’organismes de l’État français qui se font avec des mots anglais Il y a aussi le difficile et troublant rapport des anciens colonisés à la langue des colonisateurs. Il y a des témoignages inédits d’écrivains et d’artistes de tous les coins de la francophonie. Certains la défendent, d’autres encore, comme Jacques Godbout, l’ignorent parce que les Français ne seraient pas encore devenus des francophones.
Ceux qui aiment le français, ceux qui sont ouverts aux autres cultures, et pas qu’à l’américaine, ceux qui connaissent l’importance des différences et de la diversité apprécieront cet opuscule qui nous livre un message vibrant, bien rendu et lucide. De plus, il faut le dire, le livre est un bel objet.
« La francophonie demeure une utopie. Le jour où les Français seront devenus des francophones, l’utopie sera sans doute sur le point de se réaliser »