Maryse Rouy continue d’initier son lecteur à la période médiévale de la plus agréable des façons. Des faits, des personnages, des détails de la vie quotidienne empruntés à l’Histoire servent de supports à une intrigue qui, pour être fictive, n’en demeure pas moins fidèle à la période explorée. Après la vie courtoise (Azalaïs ou la Vie courtoise), puis la chevalerie (Guilhem ou les Enfances d’un chevalier), c’est l’Inquisition et la pratique clandestine de la vraie religion qui ont inspiré Maryse Rouy. Minerve, bourg languedocien assujetti par Simon de Montfort en 1210 pendant la croisade des Albigeois, se trouve trente ans plus tard assailli par la peur à la découverte du cadavre ensanglanté d’un dominicain près du puits. Que venait faire le religieux à Minerve, se demandent, inquiètes, les familles hérétiques ? N’était-il pas accompagné, comme le veut la coutume chez les dominicains ? Si oui, qui était son compagnon de route ? Est-il mort ? Où est le cadavre alors ? Si non, s’est-il enfui pour prévenir l’évêque de Carcassonne ? Si tel est le cas, l’inquisiteur devrait être dépêché. Or ça, nul Minervois ne le souhaite. Mais surtout, qui donc avait intérêt à faire disparaître le dominicain ? Certains ont des raisons de suspecter l’un ou l’autre des villageois, mais tous se taisent, encore ébranlés par le massacre survenu trois décennies plus tôt. Pourtant, un événement tragique oblige les Minervois à prévenir l’évêché qui leur expédie l’inquisiteur Aurélien Barthès pour éclaircir les choses. Sauf Gaillarde, la fière prostituée, tous les Minervois tremblent devant l’ascète autoritaire qui n’hésite jamais à les humilier et qui cherche le maillon faible par qui pourrait venir la délation.
Au fil des pages, le lecteur est amené à découvrir chez certains personnages des secrets profondément enfouis, secrets susceptibles d’avoir incité au meurtre. Finalement, la conspiration du silence servira la lâcheté plutôt que la justice, les plus forts exacerbant les préjugés des autres pour rejeter sur des boucs émissaires la responsabilité de leurs propres fautes. Avec ses romans, Maryse Rouy construit un univers médiéval revisité par une sensibilité toute moderne, habilement masquée par des emprunts à la langue du Moyen Âge.