Que la mer, les couleurs, les grands oiseaux, les sons, l’éternité et le vent se mettent à couler sous la plume du poète, il n’y a en cela rien d’étonnant. Mais, quand le poète réussit à transcender la musique des mots, à nous éblouir, à nous attirer irrésistiblement, même au pays de ses inquiétudes, voire de ses craintes devant l’inéluctable, cela tient d’un incomparable talent.
Sans tristesse et sans amertume, mais plutôt dans une symphonie de lumière et avec une lucidité déconcertante, Pierre Chatillon nous fait cadeau de ses envolées exploratoires vers les limites de l’éternité et de l’infini : « [J]e crois que l’infini est un grand bercement ».
Les ailes de la mer réunit quelque 80 morceaux sous un même titre. En réalité, ils forment une trame, celle de la vie qui explose dans une exploration sensorielle, exaltée par la présence constante de la mer, des paysages et des oiseaux marins. Un fil conducteur, la recherche de la lumière et le questionnement sur l’après, parfois en filigrane, paisible, « la même inquiétude de durer, la même profondeur céleste du mystère » : « [J]e crois qu’après la mort le temps s’étire et se rétracte laissant l’âme bienheureuse au centre de ce balancement ». Parfois aussi, l’angoisse transparaît : « [M]ais nous quand on n’a plus de corps jusqu’à quelle altitude peut-on monter avec les ailes de la mort et comment atterrir de nouveau sur la grève ? »
La mort, sitôt exprimée, sitôt conjurée, car même au cœur de l’angoisse, on s’élève et on continue de marcher vers la lumière – « ayant dépassé les angoisses du temps [ ] je suis à la fois le voyageur de l’ombre et de la lumière » ; de frôler l’omniprésent mystère, « serait-ce que j’approche de la transparence ? »
C’est la poésie d’un homme mûr, accroché à la splendeur de l’univers qui l’émerveille et qu’il voudrait contempler à l’infini, que Pierre Chatillon nous offre comme un cadeau : « Que chaque poème de mon livre se déploie telle une aile mouillée d’écume qui étincelle et s’envole vers le ciel intime de chaque lecteur »
Un recueil à garder à portée de main pour y glaner, aux jours gris, des bulles de lumière et d’espoir, à boire comme un grand cru et à écouter comme un concerto de Mozart.