Même s’il souffre de quelques invraisemblances, ce roman de Diane Vincent plaira par l’originalité de sa démarche et par sa conclusion ouvrant sur l’éthique.
C’est de son lit d’hôpital que l’inspecteur Vincent Bastianello, du SPVM, mène (ou fait mener) son enquête. Le policier a été gravement brûlé alors qu’il tirait un truand d’un incendie et il subit dans l’impatience une série d’interventions chirurgicales destinées à reconstituer ses tissus et à lui redonner l’usage de ses jambes. L’importance des ressources mises en branle pour cette réhabilitation et quelques réflexes plus mesquins conduisent le policier à la perplexité : d’où proviennent les fonds plantureux dont jouit la clinique qui lui restitue la vie ? Son soupçon englobe le chirurgien célébrissime qui dirige l’offensive médicale : « Il est pas net, je te dis. Je sais pas ce qu’il trafique, mais je suis certain qu’il a un gros poids sur la conscience ». De fait, la paranoïa de Bastianello se révèle bonne conseillère et le docteur Graham lui-même avalise les intuitions du policier. À celui-ci de passer ou non à la dénonciation.
Il incombe à l’auteure de justifier une ambivalence inattendue chez un policier ; après tout, livrer un coupable à la justice, n’est-ce pas le geste auquel tout le prépare ? En l’occurrence, l’enquêteur a quelques raisons d’hésiter. S’il révèle ce qu’il sait, il mettra un criminel hors d’état de nuire, mais gâchera la vie d’un jeune innocent ; si, au contraire, il garde pour lui la révélation qu’on lui a livrée, aucun innocent ne sera sacrifié, mais un malfaiteur continuera ses méfaits.
Le lecteur aura, lui aussi, des raisons de contester les choix de l’auteure. Si, par exemple, celle-ci avait fait appel à un journaliste d’enquête plutôt qu’à un policier, peut-être l’ambivalence s’expliquerait-elle mieux ; le journaliste aurait pu arguer de devoirs différents. Un policier ?
On aura aussi le droit de s’interroger sur le talent littéraire subit du policier. Tenu loin du livre sa carrière durant, à peine Bastianello est-il cloué à son lit de douleur qu’il rédige et disserte avec fougue : « Ainsi, écrit-il, ayant grandi dans l’oxymore d’une omerta cacophonique qui terrorise par des sourires glaciaux, j’ai été un enfant pile ou face ». Étonnant.
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