Court recueil de textes rédigés (et/ou empruntés, modifiés et colligés) par le barde belge pour le spectacle éponyme, en son pays mais également en France et au Québec, qu’il présenta en moult occasions depuis 1996.
Julos Beaucarne, ce mélange en un seul être de Ricet Barrier et de Félix Leclerc, et certainement l’artisan du verbe chanté actuellement le plus connu de la Wallonie, a su constituer et préserver au fil des décennies un public fidèle au sein de la francophonie, et notamment ici en terre d’Amérique. Ce jeune homme qui ce juin même célèbre ses 65 coups de klaxon n’en finit pas de nous étonner depuis ce jour de 1961, où il honora les frais de réparations de sa voiture en panne en jouant soudainement les Assurancetourix sur la place publique. À peine quinze ans plus tard, il se voit honoré à son tour du prestigieux Prix de l’Académie Charles Cros pour l’ensemble de son œuvre discographique.
La Québécitude, il connaît. Parmi ses tournées, on mentionnera ce fameux concert en tandem avec son ami Raoûl Duguay (Québec, 1984), une originale collaboration sur scène avec le psychanalyste Guy Corneau (Bruxelles, 1996) et un spectacle en France (Bourges, 1982) en équipe avec nul autre que Gilles Vigneault. Dès 1973, Julos nous offrait un 45 tours intitulé : Brassens et Vigneault adaptés en wallon. Front de libération des arbres fruitiers(1974) et Le vélo volant(1979) – albums parmi les plus représentatifs de sa production chansonnière – sont parmi les premières créations qu’il me fut donné de découvrir. Et ce à la faveur de bell(g)es amitiés, toujours solides et vivaces par ailleurs.
Ce recueil (venons-y enfin, n’est-ce pas), publié par les soins d’une maison québécoise, constitue certes l’une des entrées possibles de l’univers beaucarnien. Il est un peu déroutant, toutefois, d’y retrouver fort peu d’originaux de la main de l’auteur même dont le nom apparaît en plat recto. Si on excepte « Périclès », « Ton Christ est juif », « La révolution passera par le vélo » (titres sympathiques et bien connus au demeurant) et quelques autres, l’essentiel du document nous conviera plutôt à des extraits (souvent légèrement remaniés, il est vrai) tirés de contes populaires ou de l’œuvre de multiples auteurs (dont Éluard, Daudet, Molière, Pourrat, Maeterlinck et même le Félix Leclerc de Pieds nus dans l’aube). Je signale au passage quelques curiosités de langue, parfois sans doute volontaires : « une après-midi » ; parfois visiblement moins : « courrez vous cacher » où en outre P[hilinthe] discute de manière inconséquente avec lui-même à un certain moment du dialogue avec l’Alceste du Misanthrope revisité).
Cela dit, c’est joli, c’est doux, c’est tendre. Et c’est Julos encore. Malgré tout. Même si pas Julos tout entier, loin s’en faut. Aussi filez chez le disquaire ou la discothèque pour en lire un peu plus. Par l’oreille du cœur.