La formule du triptyque est chère à Michael Cunningham. Déjà dans son roman Les heures – prix Pulitzer 1999, porté brillamment à l’écran par Stephen Daldry – il met en scène trois femmes, trois époques. Une description de la condition féminine s’appuyant sur l’œuvre de Virginia Woolf.
L’auteur récidive avec Le livre des jours, entremêlant trois visions de violence et de mort dans la vie de New York. Le roman vibre au rythme de Walt Whitman (1819-1892) – le chantre de Manhattan – et de Feuilles d’herbe, son œuvre magistrale. Cunningham le cite sans relâche : « Mourir est différent de ce que l’on croit, c’est un sort plus heureux ». Avec sa « longue barbe blanche de Père Noël, un chapeau à large bord [et] aimant les garçons », le plus grand poète des États-Unis est peut-être ici le sauveur qui redonne l’espoir
Les trois récits du Livre des jours ne forment-ils qu’une seule histoire déclinée au passé, au présent et au futur ? Lucas ou Luke, Catherine, Cat ou Catareen, Simon, les personnages reviennent constamment virevolter autour de l’emblématique ange de Bethsaïda à Central Park. Partageant une même conviction « que rien, pas même Dieu, n’est plus grand pour chacun que soi-même ».
Sur fond d’indigence et d’enfants travaillant en usine, la première histoire s’achève dans les flammes du Triangle Shirtwaist, un des pires incendies de la ville qui a véritablement fait 147 morts en 1911. Les kamikazes de la deuxième histoire, si réels, si actuels, ont foi en leur mission. « Personne ne meurt vraiment. Nous nous perpétuons dans l’herbe », affirment ces enfants terroristes. En dernier lieu, une nurse lézard et quelques androïdes de science-fiction évoluent dans un grotesque Luna Park du New York de demain.
Bizarre mélange des genres. Insolite destin des États-Unis. Les femmes sont-elles donc appelées à mourir et d’étranges enfants à être l’avenir de l’homme ?