Ce recueil de onze nouvelles, dédié à sa famille, est sans doute le livre le plus autobiographique avoué et assumé que Margaret Atwood ait publié à ce jour. Le regroupement des nouvelles suit d’ailleurs une ligne chronologique qui épouse le cycle d’une vie. Les textes abordent tour à tour la vie de famille à différents moments de son cycle élargi, allant de la naissance d’un nouveau membre à la mort annoncée du père dans la nouvelle éponyme. Le texte d’ouverture, « Les mauvaises nouvelles », met en scène un couple âgé à l’aube d’une nouvelle journée. Lui, énonce sans retenue son appréhension devant les nouvelles du jour, mauvaises il va sans dire ; elle, cherche à en retarder la prise de conscience, le jour est si jeune, la vie si courte, pourquoi faudrait-il tout sacrifier aux promesses de l’aube ? Avec un sens de l’observation des plus aiguisés, une ironie à peine feinte, douce et touchante par moments, Atwood brosse le portrait d’un couple vieillissant, heureux d’être encore là, vivant, alors que tout autour d’eux ploie sous l’avalanche des mauvaises nouvelles.
« The art of cooking » relate l’arrivée d’un nouveau-né qui viendra inévitablement bouleverser l’ordre des choses, la nonchalance d’un été qui s’étire avec la préparation de la grande sœur qui apprend à tricoter une layette. Ce texte brosse avec tendresse le passage de l’enfance à l’âge adulte, de l’insouciance à la prise de conscience des choses de la vie. Plus loin, la même jeune fille devenue adulte assistera, impuissante, à l’effondrement du père, figure emblématique de cette chronique familiale, victime d’un accident cérébrovasculaire. Nul apitoiement toutefois dans ce texte, mais le récit, sobre et efficace, d’une ultime tentative pour retarder l’issue de toute vie. La nouvelle épouse ici la double trame d’une expédition périlleuse au Labrador et le vain combat pour se remettre d’une attaque cérébrale. Dans l’un et l’autre cas, le silence et la mort sont donnés comme seule issue.
La traduction ne rend toutefois pas toujours avec exactitude la réalité nord-américaine. Sans aller jusqu’à parler de fiasco, c’est pour le moins agaçant.