Patrick Bourgeois se réveille-t-il la nuit pour détester le journaliste André Pratte ? Je ne sais. De son propre aveu, des amis l’ont déjà invité à ne pas s’épuiser en détestation de l’éditorialiste. On acceptera quand même la justification de Bourgeois : face aux moyens dont use et abuse une presse québécoise monolithique, mieux vaut dénoncer les mensonges dès leur incubation. Or, selon Bourgeois, les textes de Pratte sont truffés de mensonges.
Bourgeois ne manque ni de souffle ni de carburant. Il appelle à sa rescousse des notions historiques indiscutables, rappelle les gestes posés par l’État central à l’encontre des intérêts québécois, vulgarise des arguments qui risquaient de ne jamais rejoindre les humbles mortels. Dans l’ensemble, les faits cités sont pertinents et percutants. Que Bourgeois les attache parfois de force à son char, cela fait partie de la nature même d’un pamphlet. On s’étonnera pourtant, parce que cela est fragile, qu’il fasse durer la Révolution tranquille de 1960 à 1980 et de l’assurance avec laquelle il fait naître à Londres « le pire colonialisme à avoir existé dans l’histoire de l’humanité ». Peut-être doit-on aussi imputer à l’inflation pamphlétaire l’envol suivant : « […] on se rend vite compte que l’économie québécoise est privée de plusieurs dizaines, voire de centaines de milliards $ par année ». C’est beaucoup !
Deux bémols. L’ancêtre que je deviens n’aime pas les épithètes de nature physique. On peut accuser André Pratte de tromper son public, mais pas d’être moins grand que le géant Beaupré ou de préférer telle coupe de cheveux. Enfantillages. D’autre part, le nombre de formules boiteuses, de coquilles et de fautes devrait inciter l’éditeur qu’est aussi Bourgeois à faire relire sa copie.