Katherine Pancol publie depuis 1979 (Moi d’abord). La traduction de ses romans en plusieurs langues témoigne de l’intérêt qu’ils suscitent. Son dernier livre s’avère ambitieux, par la quantité de personnages qu’il met en scène, parmi lesquels on trouve le cercle des proches de Joséphine, personnage central, leurs relations respectives et le voisinage dans le beau quartier de Paris où elle vient d’emménager avec sa fille cadette, Zoé. Chacun participe à la fresque que la romancière trace de la société de notre époque. Une intrigue policière s’intercale pour soutenir l’intérêt, bien que l’action naisse surtout de la friction des valeurs divergentes des personnages et de leurs rapports doux-amers.
En effet, ce roman fait se rencontrer la tendresse, l’authenticité, l’amour, l’engagement et l’arrivisme, le cynisme, le mensonge, la cupidité, et j’en passe, les personnages cumulant qualités ou vices, sans mélange. La narration passe en grande partie par le regard de Joséphine, historienne et auteure d’un premier roman devenu un best-seller. Mais elle a la réussite modeste, cette « petite tortue » ; elle est surtout préoccupée par ce qui arrive autour d’elle et de ses proches, qu’elle voit comme les représentants d’une société ayant perdu ses repères : « La société, aujourd’hui, ne croit plus à l’âme. Elle ne croit plus en Dieu. Elle ne croit plus en l’Homme. Elle a aboli les majuscules, met des minuscules sur tout, engendre le désespoir et l’amertume chez les faibles, l’envie de déserter chez les autres. Impuissants et inquiets, les sages s’écartent, laissant le champ libre aux fous avides ». On s’étonne qu’elle soit fille d’Henriette, sœur d’Iris et mère d’Hortense, toutes trois d’un cynisme consommé. Mais la génétique a de ces secrets !
On pourrait trouver plus singulier que ce roman réaliste, qui raconte la violence urbaine, comporte certaines bizarreries, notamment l’actualisation d’un sort jeté par une voyante et la réincarnation d’un génie dans le corps d’un bébé. Et, en dehors du champ surnaturel, ce flou qui entoure l’ascendance du personnage de Gary, fils de la meilleure amie de Joséphine, dont on apprend soudainement qu’il a été appelé par sa grand-mère, la reine d’Angleterre, qui lui intime l’ordre de choisir entre deux orientations professionnelles. Mais, somme toute, ces détails se noient dans un volumineux roman dont les multiples épisodes s’emboîtent pour donner une histoire bien ficelée qui nous amène à Paris, Londres, et même à Shanghai.