La tolérance est devenue, dans notre société multiculturelle, un grand défi. Aussi ce concept constitue-t-il un des sujets de réflexion les plus pointus de l’actualité politique des sociétés contemporaines. Nous semblons en effet désarmés devant des situations dites d’« accommodement raisonnable », qui provoquent souvent de vives réactions.
Dans ce petit livre sont rassemblées les réflexions de trois intellectuels. Celle du chercheur Marc Angenot m’est apparue comme la plus captivante.
Marc Angenot condamne une sorte d’esprit du temps, ce qu’il appelle un « tolérantisme obligatoire », nouvelle religion civique prônant l’acceptation béate de toutes les cultures, fondée sur l’autocensure, le « ne jugez point ». Or, pour qu’elle soit véritable et qu’elle permette une réelle avancée du débat social, la tolérance doit accepter que des esprits dits humanistes et séculiers puissent critiquer les idéologies qui « déclarent avoir Dieu de leur côté ». « Les conceptions juridiques actuelles qui réclament un ‘accommodement raisonnable’ avec tous les fanatiques tandis qu’elles ne reconnaissent aucun droit, sinon de se taire, aux esprits libres et rationnels qui n’appartiennent pas à une confession déterminée découlent de l’idée tordue du tolérantisme […] et n’a rien à voir avec la tolérance. »
Bref, Marc Angenot prône une vision active de la tolérance, et non pas une passivité forcée, imposée par un « politically correct » qui cherche à étouffer toute critique des demandes religieuses alimentées souvent, faut-il le rappeler, par les tenants d’une vision rigide, parfois obscurantiste, de leur religion.