Dans leur étude intitulée La terre, la Bible et l’Histoire, « Vers le pays que je te ferai voir », les chercheursAlain Marchadour et David Neuhaus – le premier est un assomptionniste français et le second, un prêtre jésuite israélien – se sont donné comme objectif de montrer de quelle manière le thème de « la terre » traverse les textes de la Bible, de l’Ancien Testament comme du Nouveau Testament. Il s’agit d’un parcours aux enjeux certes imposants, qui parvient néanmoins à nous donner un nouvel éclairage sur la perception judéo-chrétienne de la Terre sainte. En plus de fouiller dans les textes bibliques pour établir l’évolution du thème choisi, les auteurs dépassent le seul contexte historico-religieux et arrivent à soulever un certain nombre de questionnements dont la richesse alimente la réflexion.
Le lecteur peu à l’affût de l’importance de la « terre » en tant qu’espace sacré dans sa perception des événements historiques sera ravi de pouvoir combler cette lacune de sa culture religieuse. La Bible demeure un texte incontournable (pour les croyants comme pour les agnostiques) et c’est par sa lecture attentive que les auteurs font de l’étude qu’ils proposent une véritable analyse littéraire. Les deux hommes évitent le piège qui consisterait à tenter de convaincre le lecteur d’un quelconque principe religieux pour miser sur la thématique elle-même. L’ouvrage répond avec rigueur au mandat établi d’entrée de jeu : « Traverser la forêt biblique, avec comme fil rouge, le motif de la terre, tant dans son épaisseur textuelle, théologique et spirituelle que dans sa postérité dans l’histoire de l’Église et dans la société d’aujourd’hui ». La richesse de l’étude proposée par ces deux hommes de foi s’affirme particulièrement dans sa structure chronologique : le lecteur parcourt d’abord l’Ancien Testament pour ensuite traverser le Nouveau, trajet qui le mène enfin vers l’analyse de la « terre » dans les derniers siècles jusqu’à aujourd’hui. Les auteurs s’attardent quelques instants sur la question de la Shoah, puis posent clairement la question qui a occupé les esprits au cours des dernières années : « Comment l’Église et les chrétiens doivent-ils se positionner aujourd’hui par rapport à cette terre que les uns appellent Israël et les autres Palestine ? » Question épineuse qui, si elle demeure sans réponse, n’en a pas moins le mérite de susciter la réflexion.