Lors d’un voyage en Inde pour couvrir la chute fatale d’un trapéziste du cirque Le Grand Ganesh, Patrick Wallingford, reporter vedette d’une chaîne spécialisée dans la catastrophe, commet une fâcheuse imprudence en tendant le micro aux lions en cage pour en faire entendre les rugissements à ses milliers de télespectateurs. Or les lions n’ayant pas eu leur ration, arriva ce qui devait arriver : « Une patte jaillit ; une griffe saisit son poignet gauche, il laissa tomber son micro. En moins de deux secondes, son bras gauche avait été happé jusqu’au coude dans la cage. Son épaule gauche était plaquée contre les barreaux ; sa main gauche, avec cinq centimètres de poignet, avait disparu dans la gueule du lion ».
Beau jeune homme, Wallingford n’a jamais laissé la gent féminine indifférente. « Le type aux lions », ainsi qu’on le surnomme après son aventure, s’est attiré la sympathie de Doris, jeune supporter des Packers, qui obtient d’Otto, son mari, qu’il lègue sa main au reporter advenant une mort prématurée, ce qui ne manque pas de se produire. S’ensuit une histoire rocambolesque à la John Irving : une gélule de prescience qui fait entrevoir au mutilé un lac vert émeraude dans le Nord des États-Unis, un chirurgien anorexique un peu fêlé qui traque les crottes de chien avec Médée, sa chienne coprophage, Mary, une ambitieuse collègue qui veut de Wallingford un enfant et bien d’autres choses encore, la jeune maquilleuse Angie, qui n’abandonne pas son chewing-gum même pendant l’orgasme, Doris Clausen qui réclame un droit de visite de la main de son mari bref, une galerie de personnages cocasses et sympathiques que l’on se prend à aimer, comme tous les personnages des romans de John Irving. Récit farfelu, La quatrième main n’en demeure pas moins une très belle histoire où les sentiments rivalisent avec la loufoquerie.