Initialement parue chez Parti pris en 1965, cette longue nouvelle – qui deviendra Les confitures de coings ( Parti pris, 1973) – présente les déambulations de François Ménard dans l’obscurité de Montréal. Ce simple employé de banque va s’intéresser à la politique en appuyant des partis s’opposant à l’ordre économique et social, l’« ordre établi », comme on l’a souvent nommé
François Ménard, alias Jacques Ferron, erre ainsi dans le labyrinthe nocturne que représente le Montréal de l’époque préfelquiste, préambule à l’éclatement des contestations survenu en octobre 1970. On se souviendra par ailleurs que le docteur Ferron, membre du Rassemblement pour l’indépendance nationale et fondateur en 1963 du Parti Rhinocéros, agira comme médiateur lors de l’arrestation, en 1970, des felquistes Paul Rose, Jacques Rose et Francis Simard.
La nuit est une allégorie assez fantaisiste issue de l’esprit de cette période trouble de notre histoire. Mais la fantaisie, curieusement, ne nous éloigne point des problèmes concrets du Québec de ce temps : elle semble même, parfois, nous en rapprocher surtout en ce qui regarde certaines réflexions sur l’argent, la lutte des classes sociales, l’indépendance ou le sens du communisme d’alors
Voilà une œuvre fort originale, à l’image de toute l’écriture de Jacques Ferron. Mentionnons que La nuit est un texte contemporain du Prochain épisode d’Hubert Aquin, d’Une saison dans la vie d’Emmanuel de Marie-Claire Blais ainsi que de L’âge de la parole de Roland Giguère.