Peu de gens, sans doute, connaissent l’unique roman de Joseph Provost, La maison du coteau, qui a d’abord paru en feuilleton avant de connaître une édition en volume séparé en 1881. Ce court texte est un réquisitoire contre l’Église catholique romaine, représentée ici par l’intolérant et omnipotent curé Nicette, dont le narrateur se charge de dévoiler le rôle socio-religieux prépondérant, abusif et au total négatif. Selon une tradition qui perdurera jusqu’au XXe siècle, Joseph Provost se sert ici du genre romanesque pour défendre une cause, en l’occurrence le protestantisme, dont il était du reste l’un des ministres, et pour illustrer plus spécifiquement la question des mariages mixtes. À une époque où l’ultramontanisme triomphait dans la société québécoise, il est surprenant d’apprendre que ce roman est tombé dès sa parution dans l’indifférence totale, sans même avoir été inquiété un seul instant par les autorités épiscopales dont les foudres étaient pourtant généralement assez promptes, voire spectaculaires.
La maison du coteau nous est aujourd’hui redonnée dans une édition soigneusement documentée par le méticuleux Jean Levasseur, professeur de littérature à l’université Bishop’s. Le texte même du roman, qui prend moins de vingt pour cent du total du livre, est accompagné d’un pourcentage égal de pages de « notes » et d’une « Introduction » plus ample encore, fort instructive et avisée. Celle- ci fait l’historique du protestantisme, en Europe d’abord puis au Canada ensuite, et situe avec justesse l’oeuvre dans son contexte québécois. D’autres textes de Provost, dont des inédits, ont été ajoutés à l’ouvrage : des esquisses biographiques, des conférences, un sermon, des articles.
L’importance documentaire de cette édition ne fait aucun doute et il faut savoir gré à Jean Levasseur de n’avoir pas lésiné sur les moyens à prendre pour enrichir la publication de ce roman à nul autre pareil dans le répertoire romanesque québécois du XIXe siècle.