Ce beau recueil à l’étrange titre est le premier d’un jeune poète de vingt-trois ans. On peut, ici, parler d’une « suite poétique », de la « chronique » d’un monde marqué par la décadence, le vide existentiel. Il s’ouvre, pertinemment, sur une citation de Nelligan évoquant la perte – sinon la mort – de l’espoir.
Voilà une poésie urbaine très esthétique qui circonscrit sa thématique à la manière d’un Jean-Paul Daoust. La ville de Montréal nous est montrée à la fois dans ce qu’elle a de séduisant et de repoussant. Notre jeune poète n’est pas, d’emblée, très enthousiaste devant ce que lui offre l’existence, mais ne se plaint pas platement. Il constate, il VOIT : « Ma parole s’est déchirée / j’ai pleuré des lettres / il ne restait de moi qu’un mot / versé dans l’évier / voici la nuit broyée dans mes os ». Une rage enrobée de fantaisie finit par créer un sens : la lucidité propre à l’acte poétique « néantise » les significations communes pour offrir un autre horizon.
De « janvier à novembre », le poète vit dans la solitude, le quotidien silencieux. Mais sa voyance éclatera en une violence crue : « Le soleil se tirera une balle dans la tête / Montréal sera triste / sur un ciel noir d’encre / les moineaux seront partis / prier sur d’autres fils électriques ».