En 1942, les Allemands viennent de franchir la frontière libyenne, le troisième et dernier volume de la trilogie des Balkans d’Olivia Manning s’ouvre sur l’arrivée au Caire de Guy et Harriet Pringle. Après avoir quitté la Roumanie, le jeune couple doit maintenant fuir la Grèce occupée. À leur arrivée au Caire, c’est toute la faune bigarrée des diplomates, aristocrates, journalistes et soldats en permission qu’ils retrouvent : « Le Caire était devenu la bonde de l’Europe. »
Quelques scènes de ce troisième tome sont particulièrement poignantes, il s’agit des passages où de jeunes soldats manœuvrent entre terreur et douleur dans le feu de l’action sur le champ de bataille, des images qui évoquent les premiers moments effroyables du débarquement des Rangers sur la plage d’Omaha dans le film de Spielberg Il faut sauver le soldat Ryan. C’est en effet avec un fort degré de réalisme et des images crues que Manning décrit avec maestria ces instants ultimes de l’histoire humaine , la guerre dans ce qu’elle a de plus absurde et les visions apocalyptiques qu’elle inflige à des hommes déjà réduits au désespoir : « Toutes les mouches du désert semblaient s’être concentrées là, attirées par l’odeur de la chair purulente; un peu plus loin il y avait pire : un charnier, ouvert car pas encore tout à fait plein, dont se dégageait une odeur pestilentielle. Les mouches qui s’y étaient posées formaient un mouvant linceul noir. »
L’aventure conjugale du couple Pringle se poursuit en parallèle, suivant elle aussi les soubresauts de l’Histoire : entre autres, le retour planifié de Harriet en Angleterre réserve à son mari et aux lecteurs une suite plutôt inattendue. Un rebondissement dont ce couple mal assorti avait grand besoin.