Le titre, presque parallèle à celui d’un ouvrage paru il y a une quinzaine d’années ( La religion de mon père, Bellarmin, 1986), n’est pas faux, mais un peu équivoque. Plus que l’histoire d’une foi, Benoît Lacroix y décrit, en effet, non la démarche personnelle d’une épouse et d’une mère de famille, mais ce que fut le cadre socioreligieux imposé aux croyants québécois d’il y a cinquante ans. Le livre, en tout cas, fait la part plus que belle aux réponses du petit catéchisme, aux mandements épiscopaux, au calendrier liturgique. Contre ce cadre rigide et souvent mal adapté à une société rurale, la foi de Rose-Anna ressemble davantage à une obéissance qu’à une adhésion.
Cela dit, sachons gré à Benoît Lacroix de l’honnêteté de cette recréation du passé. On le sent blessé de ce que ses parents aient reçu des ordres plus qu’une conviction. On le soupçonne même de préférer le propos contestataire de son père Caïus aux silences lénifiants de la mère. La superbe richesse de la langue paternelle y est sans doute pour quelque chose. Il est sidérant, d’autre part, qu’il faille, littéralement, un guide de lecture étalé sur des dizaines de pages à l’écriture microscopique pour rendre intelligible aux jeunes générations le survol d’un Québec quand même récent. Que le temps a accéléré son pas depuis Ronsard et même Apollinaire !