Une dame de cent ans nous raconte sa vie. Elle est née en 1878, a vécu dans le milieu de la bourgeoisie québécoise. Les mâles de sa lignée étaient tous de la « noblesse de robe », des notaires, des avocats, des juges, imbus d’eux-mêmes, et mariés à des femmes gonflées de vanité. Notre dame faisait donc partie de l’élite et avait dû se plier à un régime d’éducation sévère qui exigeait d’elle une conduite exemplaire. Elle confesse une dérogation majeure aux règles, en cachette… mais dans la plus belle des extases…
Ce texte a été monté pour la première fois en 1978 à Radio-Québec ; il était interprété par la digne Huguette Oligny. Je me demande ce que les gens en ont pensé alors. L’écriture est si délicieuse, Huguette Oligny si attachante, Françoise Loranger si brillante : un tel trio peut faire admettre l’inadmissible…
Le second texte, une nouvelle publiée en 1961 dans le magazine Châtelaine, s’intitule Diogène 1960. Vivant en ermite dans la forêt aux environs de Sept-Îles, un homme, que deux semaines de tempête de neige ont tenu enfermé dans sa cabane, et qu’une grippe intestinale a retenu au lit pendant deux autres semaines, accueille, après ces vingt-six jours de réclusion, un homme débarqué de nulle part qui meurt chez lui après avoir affirmé qu’une guerre vient de tout détruire à l’extérieur…
Est-ce vrai ou pas ? La peur d’être l’unique survivant d’une catastrophe fait replonger le solitaire dans ses plus lointains et douloureux souvenirs, ceux qui lui ont fait fuir la civilisation. Fuir avec la possibilité de retourner en arrière quand bon lui semblerait, c’était rassurant, mais maintenant… si plus rien n’existe… Vivre seul pour le reste de ses jours, est-ce une perspective tolérable ?
Cette nouvelle à caractère philosophique est un petit chef-d’œuvre.