Pour Ian Kershaw, rédiger le récit historique du seul attentat à aboutir contre Adolf Hitler est somme toute chose assez simple. Auteur de plusieurs volumineuses études sur le chef politique du IIIe Reich, cet historien a accumulé au fil des années un impressionnant bagage de connaissances historiques qui se reflète dans la qualité des détails avec laquelle il parvient à reconstituer certains événements. C’est ainsi que ce livre sur l’attentat de Claus von Stauffenberg, baptisé « opération Walkyrie », permet un éclairage complet sur cet événement qui aurait pu changer le cours de l’histoire.
Cette opération prend forme dans l’esprit de certains militaires lorsque la Wehrmacht se trouve dangereusement embourbée en Russie et que le nombre de dissidents, flairant la catastrophe, va grandissant. Toutefois, pour tenter une action, il fallait trouver un personnage assez haut gradé qui gravite dans l’entourage immédiat de Hitler. Claus von Stauffenberg, blessé alors qu’il servait en Afrique du Nord en 1943, nommé ensuite à de hautes fonctions, était la personne tout indiquée. Profondément désabusé, il était persuadé que le Führer menait l’Allemagne droit vers un désastre. En quelques jours tout fut décidé. Entre le moment où la bombe fut amorcée et celui où les premiers conspirateurs furent exécutés, l’opération ne dura que quelques heures.
À la lecture de ce livre, trois éléments surprennent. Le premier est que plusieurs personnes ont planifié un attentat contre Hitler, et ce, dès le début de sa carrière politique, avant même qu’il n’accède au pouvoir. Le second est que nombreux étaient les dissidents. Dans le cas de l’opération Walkyrie, c’est plus de six cents personnes qui seront emprisonnées. Le dernier élément est que ces dissidents, germaniques jusqu’au bout des ongles, ont été jusqu’à rédiger avec minutie de nombreux documents détaillant la planification de l’élimination de leur dirigeant ainsi que l’organisation politique d’une Allemagne post-nazie, dont des extraits sont présentés à la fin du livre. Un livre qui permet encore une fois de constater que, derrière les bannières arborant le svastika, les Allemands étaient loin d’être unis pour une même cause.