Les grands espaces et les aventuriers qui les sillonnent exercent sans contredit une intense fascination sur Michel Le Bris ; en témoignent les titres de ses nombreux ouvrages : La fièvre de l’or, Les flibustiers de la Sonore, Pirates et flibustiers des Caraïbes, L’homme aux semelles de vent pour n’en nommer que quelques-uns. Dans La beauté du monde, il nous invite à marcher sur les pas d’un audacieux couple du siècle dernier, Osa et Martin Johnson, auquel il a d’ailleurs consacré un album au titre évocateur : Africa, images d’un monde perdu.
Voilà un livre ambitieux, mi-roman, mi-récit de voyage, qui met d’abord en scène Winnie, auteure d’un récit pour adolescents et d’un conte animalier. Impressionnée par ces deux publications, Osa Johnson souhaite qu’elle l’aide à rédiger son autobiographie. C’est ainsi que débute le long périple que l’on entreprend à la lecture de ce pavé de près de sept cents pages.
Après une lente description des années new-yorkaises du couple en quête de mécènes, le récit romancé de la première expédition en Afrique d’Osa et Martin Johnson fait rapidement oublier les longueurs du début. Audacieux chasseur d’images, Martin Johnson entraîne son père, sa femme, leur singe, ainsi que des centaines de porteurs en des terres sauvages inhospitalières pour découvrir et immortaliser, avant qu’un autre type de chasseur ne la détruise, une faune généreuse et encore préservée.
À l’incursion en des lieux incertains et hostiles où les liens, inévitablement, se consolident ou se rompent succèdent des scènes majestueuses d’une nature luxuriante et intouchée. « Ce fut d’abord une ligne tremblante à l’horizon, un mince liséré d’or sous les traînées violines de la nuit s’en allant, puis un mascaret déferlant au ras des herbes hautes, une nappe d’or ondoyante incendiant les grands arbres, accrochant des pluies de perles aux branchages. »
Au mépris du danger, en ces terres lointaines et fascinantes de l’Afrique du début du siècle dernier, on a vraiment l’impression d’être du voyage des Johnson. Et, au fil des pages, on se laisse éblouir, comme ils l’ont été, par la découverte d’un continent où se côtoient l’enfer et le paradis.