La journaliste et socio-historienne Françoise Deroy-Pineau trace de la pionnière en titre le portrait d’une héroïne déterminée qui ne fut jamais mariée ni jamais religieuse, qui devint la « première infirmière laïque en Canada » et qui est reconnue comme la cofondatrice de Montréal avec Paul de Chomedey de Maisonneuve. Elle met en même temps en scène non seulement des figures connues de l’histoire québécoise, comme Marguerite Bourgeoys, Marie de l’Incarnation, Jérôme Le Royer de La Dauversière, Lambert Closse, les riches bienfaitrices Marie-Madeleine de La Peltrie et Angélique de Bullion, les jésuites Charles et Jérôme Lalemant, Isaac Jogues, Paul Le Jeune…, mais aussi des personnages dont la mémoire collective n’a que peu ou prou retenu l’existence : le clerc Nicolas Dolebeau, le jésuite Jean-Baptiste Saint-Jure, Pierre Chevrier (baron de Fancamp), les couples d’habitants Boudart-Mercier et Primat-Messier, attaqués par les Iroquois, le chirurgien Étienne Bouchard… On suit la pionnière, née à Langres en 1606, depuis son départ de sa ville natale, le 30 mai 1640, sous Louis XIII, jusqu’à sa mort à Montréal le 18 juin 1673, et même au-delà puisque son souvenir est encore vivant aujourd’hui (noms de rues, statue, tableaux, vitraux, timbres…).
Françoise Deroy-Pineau reconstitue le contexte historique de l’époque en évoquant les longues traversées de l’Atlantique, le difficile recrutement de religieuses, d’artisans, de colons et de filles à marier, la gestion de l’Hôtel-Dieu de Montréal, le constant danger amérindien, le harcèlement comptable de Monseigneur de Laval… L’auteure met régulièrement l’accent sur le féminisme religieux en France et en Nouvelle-France et se rapproche souvent plus de la romancière que de l’historienne en s’attachant à des détails, plausibles ou avérés, notamment dans l’invention de dialogues et dans la notation du vent et des senteurs d’algues de La Rochelle ou des bouclettes de cheveux de Jeanne. Qu’on lise à cet égard ces lignes sur la cueillette dans les bois de Ville-Marie des « fraises de juin et [des] framboises de juillet, dont une bouffée d’air chaud et humide apporte parfois les délicieux effluves », et ces propos sur la « table de merisier drapée d’un tapis orné d’une frange de soie de même couleur que [le] dessus de lit » de Jeanne, ou sur « son grand lit de noyer, sous un ciel de lit fait d’une nappe brodée ». Il faudrait par ailleurs harmoniser trois données chiffrées de la notice biographique avec celles de la quatrième de couverture.
JEANNE MANCE
DE LANGRES À MONTRÉAL, LA PASSION DE SOIGNER
- Fides,
- 2016,
- Montréal
139 pages
9,95 $
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