L’injustice, la cruauté, la bêtise, l’acharnement : voilà les mots qui viennent à l’esprit à la lecture de ce remarquable roman, qui peut être vu comme un acte réparateur. Bien sûr, il est trop tard pour que la victime de tout cela puisse en trouver quelque apaisement. Jean-Luc Seigle, qui s’est inspiré d’un fait réel, a imaginé une reconstitution de cahiers – disparus – écrits par la protagoniste de cette histoire, qui voulait présenter sa version des faits à l’homme qu’elle aimait et qu’elle voulait épouser.
Pauline Dubuisson n’a que quatorze ans au début de l’Occupation, en 1940. Sa famille, qui habite Dunkerque, a alors déjà payé un lourd tribut à la guerre, deux des trois fils ayant été tués au combat. La mère, abattue par ce drame, passe le plus clair de ses journées dans sa chambre. Et voilà que le père imagine une solution pour lui redonner goût à la vie. Une solution que Pauline paiera très cher après la Libération. Des hommes viennent alors la chercher et lui font subir des traitements cruels. Comme elle l’écrira plus tard : « […] la haine, l’humiliation publique, la tonte de mes cheveux, les coups, les viols, les croix gammées peintes sur mon corps, avaient déjà anéanti ma vie ». Des traitements que de bonnes gens, entre autres des partisans de la dernière heure, considèrent comme légitimes. Pourtant, elle n’a pas encore dix-sept ans. Elle doit sans doute d’être encore en vie à son père, qui rappelle aux tortionnaires le sacrifice de ses deux fils morts pour la patrie.
Mais, ce que Pauline a subi ce jour-là restera à jamais gravé dans sa tête, dans son cœur et dans son corps. Soumise à l’opprobre, elle écrit, après qu’un jeune homme lui a souri : « Jamais je n’aurais imaginé qu’un sourire puisse changer l’état des jours, de mes jours, jusqu’au prochain regard hostile ». Elle part pour Lille, où on ne la connaît pas. Mais, lorsqu’elle croit avoir droit à une nouvelle chance, son passé finit par la rattraper. Cette fois-ci, elle se réfugie au Maroc. Et, encore une fois, ce qui devait arriver…
L’acharnement manifesté envers cette femme, encore très jeune lors des événements qui ont gouverné sa vie, est inconcevable. Bravo à Jean-Luc Seigle pour avoir révélé son histoire.
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