Après avoir fait paraître Penser la communication (1997) puis le controversé Internet et après ? (1999), le sociologue français Dominique Wolton met les choses au clair avec cet ouvrage d’entretiens. Une mise au point était devenue nécessaire car, à la suite de son dernier livre consacré à Internet, beaucoup de lecteurs et de commentateurs, croyant que Wolton s’opposait à Internet, l’avaient catalogué trop rapidement parmi les rétrogrades. Au contraire, le spécialiste des médias analyse le phénomène Internet pour le contextualiser. Il considère les dimensions économiques, sociales, géopolitiques et culturelles qu’implique le phénomène de société « Internet ». Les espoirs d’universalisme auxquels on pouvait croire lors de l’avènement de la culture de masse et de la radio durant les années 1930 sont réapparus avec l’émergence d’Internet, que l’on perçoit comme une nouvelle conception propre à résoudre les problèmes de la pauvreté et de l’ignorance. En réalité, Internet donne accès à des informations, à des données, innombrables et dans le désordre, mais pas forcément à des connaissances. Il manque la validation et le tri. C’est pourquoi l’auteur peut réaffirmer que les livres sont ici pour rester et que l’éducation doit conserver sa dimension humaine : « Il n’y a pas de livre sans professeur, sans bibliothécaire, sans documentaliste. »
Enfin, dans un texte concis mais éloquent, intitulé « Penser Internet », l’auteur conclut son propos en se concentrant sur trois points : l’internaute, l’individu, le citoyen. Ce Petit manuel de survie constitue un livre percutant et limpide, parfois provocateur, non pas tant sur Internet que sur certaines logiques que l’on ne remet jamais en question et auxquelles obéit notre société, comme le culte du progrès et de la rapidité, le fantasme de la technique et l’illusion de la disparition des idéologies.