Hubert Aquin blues aurait pu s’intituler « L’énigme Hubert Aquin » ; car cet homme est une énigme. Richard Dubois nous présente le dossier de façon subtile et convaincante, parfois même insidieuse, de ce cas unique dans la littérature québécoise. Aquin faiseur et fabulateur, plagiaire à certains moments même, s’affublant du titre de terroriste, etc. : Richard Dubois va droit au but ; mais son plaidoyer est constamment nuancé par l’admiration qu’il porte malgré tout à l’auteur.
Avant tout, comme beaucoup d’autres mais avec plus de flamboiement, Hubert Aquin voulait s’imposer à l’attention de tous et par tous les moyens. A priori, il choisit d’être « contre ». Contre la littérature canadienne-française, contre l’Église, contre la revue Liberté, contre le RIN, contre la France, contre le Canada, contre le « joual », enfin, contre tout ce qui bouge. Il se décrit lui-même comme un anarchiste et, en dernier recours, comme un révolutionnaire. Il monte son propre théâtre funambulesque dont il est le seul héros. Un parano, quoi !
Par ailleurs, occasionnellement, comme des comètes qui traversent le ciel, ses écrits projettent d’étonnantes flambées poétiques qui donnent les plus belles pages de ses livres. Un homme déçu de ne pas être Tout ou, comme le dit Richard Dubois, un éternel petit garçon esseulé qui souffre, hanté par la mort ; on en connaît la suite tragique.
Voilà un livre passionnant, mené avec une grande habileté, dans un style direct et entraînant. Un livre à lire pour comprendre une époque encore récente dont le souvenir s’est un peu affadi.