À moins d’avoir été comblé des confidences de Golda Meir (1898-1978), nul ne peut imaginer le portrait que trace d’elle sa biographe Dominique Frischer. Sans voyeurisme comme sans dissimulation, celle-ci révèle, en effet, des facettes bien inattendues des convictions et du tempérament de l’ex-première ministre d’Israël. Certains aspects ont trait à la vie privée d’une des rares femmes à participer puissamment à la naissance de l’État d’Israël ; d’autres, par-delà la fermeté de son constant dévouement à la cause israélienne, jettent une lumière crue sur les convictions abrasives et souvent nocives du personnage.
Les premières années de Golda Meir donnent une juste idée de ce que sera sa carrière. Née à Kiev, elle émigre aux États-Unis avec ses parents pour échapper aux pogroms qui dévastent le pays. L’effroi vécu alors la marque à jamais. Devenue (presque) adulte, pourvue d’un mari nettement moins fringant qu’elle, Golda prend racine en Palestine et y affronte avec courage les douleurs d’un Israël alors en gestation. De son séjour en terre d’Amérique, elle retiendra l’atout déterminant d’une parfaite fluidité en anglais. Peu instruite, plus familière du yiddish que de l’hébreu, elle pourra quand même, grâce à cette maîtrise de l’anglais, se rendre indispensable aux relations entre la colonie juive et les mécènes de la diaspora.
La biographe insiste sur le charme de la jeune Golda Meir, ainsi que sur le pouvoir des mâles qui y ont succombé. Très tôt s’amorce une succession de liaisons avec plusieurs personnalités masculines majeures ; autant de parrains utiles et fiables.
Si cette facette de la vie de Golda Meir fut peu visible, ses convictions politiques sont affichées et inoxydables. « Jamais elle ne considérera que les Arabes palestiniens, qu’elle a toujours ignorés, pour ne pas dire méprisés et honnis, avaient un droit légitime sur la Palestine. » Autre trait indélébile de son caractère, elle frappait d’une vindicte tenace quiconque lui résistait. « Peres devait subir à plusieurs reprises les conséquences de cette rancune. Ce fut également le cas d’autres dirigeants dont Moshe Dayan, qu’elle avait également pris en grippe. » Dominique Frischer précise ce portrait en présentant plusieurs exemples de la propension de Golda Meir à ne jamais admettre ses torts dans les ennuis vécus par Israël. Interrogée en 1971 à l’occasion de l’émission Thirty Minutes, Golda Meir chargea les Arabes de tous les torts : « L’entretien révéla aussi son obstination à avoir toujours raison contre tous. En ce sens, on peut dire qu’elle porte une lourde responsabilité dans le déclenchement de la guerre du Kippour, conséquence de son intransigeance ».
À l’actif de Golda Meir, une solidité de tous les instants, quelque chose d’analogue à ce que Winston Churchill et Margaret Thatcher ont offert à leur peuple commun. Aujourd’hui encore, c’est à cette qualité que rendent hommage les Israéliens plus de 30 ans après sa mort. Sans tourner à la charge, cette biographie fait contrepoids.
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