Si notre « temps est aux cagoules », la poésie a l’exigence, le devoir de se manifester à nous. Ainsi le poète répondra à cette nécessité de repousser les aliénations d’une époque, même si « sur un banc un livre parle seul ». On sait, de toutes façons, que la culture comme « horizon » – en l’occurrence, ici, la culture poétique – aura toujours sa raison d’être malgré tous les crépuscules qui nous ombragent.
Stéphane Jean montre, avec un recueil très stylisé, que l’« humaine condition » ne peut être constamment oppressée par le joug, le poids de la douleur : celle-ci mutera qualitativement en cet objet excessivement raffiné créé par l’acte poétique. Et cet acte pare le désert qu’est trop souvent l’existence de couleurs inédites. Le poète est sans doute ce « marcheur » qui « dénonce le réel ». L’humain pourra-t-il ainsi nous revenir – une vérité « authentique » ne s’est-elle, par ailleurs, jamais manifestée ?
La culture adviendra un jour, écrit l’auteur, comme « rédemption ». La poésie, ce « goulag de Dieu », agissant afin de nous ressaisir en regard de ces cataclysmes créés tout au long d’une histoire souvent sinistre. Cependant, le poète est catégorique : « [L]’avenir est un cargo fantôme ». La noirceur sera-t-elle toujours notre unique horizon, malgré la présence du sens poétique ? Avons-nous, pauvre humanité, atteint un point de non-retour ?
Mais la culture persiste et signe : « [A]u milieu des cyclones sommeille un récit ».