En 2003, Serge Raffy envoie Castro et sa révolution au gibet. Son livre, Castro l’infidèle,« roman hallucinant mais vrai » selon la 4e de couverture, fait davantage office de réquisitoire que de biographie : ses sources presque uniquement des anticastristes notoires de Miami, des anticastristes de Cuba et des anticastristes « tout court ». Avec deux fois plus de références bibliographiques (œuvres et discours de Castro, écrits de Che Guevara, rapports de journalistes dissidents et d’agences internationales, monographies et ouvrages de toutes allégeances), Volker Skierka propose « une vision équitable d’un révolutionnaire devenu un dictateur ». Alors que Raffy occulte la « bête politique » qu’est le Líder Máximo, Skierka lui consacre de très nombreuses pages fort bien documentées. Que l’on soit castriste, anticastriste ou que l’on loge quelque part entre les deux, force est de constater que le régime Castro tout comme son ministre-président ont la vie dure ! L’auteur nous en relate d’ailleurs, références à l’appui, les bons et les mauvais côtés : en libérant les Cubains d’une dépendance coloniale, la Révolution leur a donné une identité et une dignidad, elle a fait de Cuba un modèle, dans le Tiers-Monde, en matière d’éducation et de santé ; en contrepartie, sous la tutelle du Líder Máximo, les Cubains, privés de libertés politiques et matérielles, de perspective sur le plan professionnel, vivent une insécurité politique constante, une pénurie de biens essentiels imputable principalement aux embargos américains, au blocus économique prolongé et inflexible de leur voisin du Nord qui n’attend que la fin du régime pour remettre la patte sur l’île afin d’y réimplanter le capitalisme et le « gangsterismo » qui y avait cours avant la chute de Batista.
Tout n’est pas si noir que le prétend Serge Raffy dans son thriller politique, et tout n’est pas si blanc à l’extérieur de l’île. N’oublions pas que la désinformation n’a pas cours qu’à Cuba
« Castro ne s’est jamais laissé détourner par des considérations matérielles. Ceux qui le connaissent, et même ses adversaires, le considèrent comme l’un des rares potentats qui ne se sont pas enrichis à l’exercice du pouvoir et qui n’ont pas transféré des millions en Suisse. » Alors que Raffy a abaissé Castro au rang des pires dictateurs, Volker Skierka le distingue des Milosevic, Hussein et autres tyrans de cet acabit. Fidel Castro « El comandante » fait incontestablement plus sérieux que la catilinaire de Raffy.