Le Canadien James King est l’auteur des biographies de William Blake, de Virginia Woolf, de Herbert Read, de Paul Nash, de William Cooper et de Margaret Laurence. Plusieurs de ses ouvrages ont reçu des distinctions prestigieuses. Il est aussi l’auteur d’un essai sur les rapports entre la vérité et la fabrication dans la rédaction des biographies. Selon lui, une biographie relève plus de la fiction que de la science. Ces préoccupations, il les pousse un peu plus loin dans cette biofiction au titre éloquent.
James King a choisi un personnage controversé, soit Thomas Griffiths Wainwright (1794-1862), un dandy anglais qui fut un critique d’art, un habile faussaire et (probablement) un meurtrier en série, qui a inspiré un essai à Oscar Wilde, un personnage de roman à Charles Dickens et un roman d’Edward Bulwer-Lytton. Pour raconter la vie de Wainwright, l’auteur a recours à un artifice : il donne la parole à une narratrice, Catherine Blake, qui a des dons occultes. Elle prête sa voix à des fantômes : Tom Wainwright, sa femme Eliza, sa belle-sœur (et victime d’un de ses meurtres) Helen, et son fils Griffiths. Chacun y va de sa propre version des faits, de sa perception du personnage principal qui lui, se présente plutôt comme une victime, avec un plaidoyer qui mélange les faits historiques, les accusations, les démentis, les fabulations grotesques et l’ironie. Mais l’intervention de ses proches change notre perception du personnage qui apparaît de plus en plus, au fil des pages, comme la franche canaille qu’il était. Malgré quelques longueurs, Faussaires est un livre fascinant qui déstabilise constamment le lecteur. James King dépeint une société décadente, sans scrupules, où les usurpateurs, les faussaires et autres trompeurs abondent, et cela dans tous les domaines de la vie publique et privée. Mais la question centrale du roman concerne la vérité en art. Comme l’affirme Wainwright : « L’œuvre d’art ‘ authentique ‘ celle qui émeut celui qui la regarde peut être tout aussi ‘ fausse ‘ qu’ ‘ originale ‘ ». Signalons que Thomas Wainwright ne fut jamais condamné pour avoir empoisonné trois de ses proches, mais il fut déporté en Tasmanie ‘ où il mourut en 1847 ‘ pour avoir fabriqué des faux chèques.