Que la poétesse américaine Emily Dickinson soit au centre de Émilie ne sera plus jamais cueillie par l’anémone de Michel Garneau ne fait pas de cette œuvre une pièce biographique. L’auteur a fondé ce beau texte sur la vie et l’œuvre poétique d’Emily Dickinson, les impressions que son écriture lui a laissées et l’imbrication de sa propre existence à celle de la grande poétesse : ce qui va, on le devine, au-delà de la simple objectivité biographique.
Le livre s’ouvre par un beau poème sur Emily Dickinson, « Cousine des écureuils », qui porte sur notre appartenance à l’immensité du monde. Du texte de la pièce, créée pour la première fois en 1980 on oserait presque dire qu’il est « poético-philosophique ». En effet, la joie d’être y est directement couplée avec l’horreur de vivre, le personnage d’Émilie évoquant l’ « esprit de malheur » qui pèse sur la condition humaine, l’absurdité qui la caractérise. C’est l’univers dans sa totalité que revendique Émilie. Elle dit : « […] je veux habiter la totalité / de la vie et mourir sera d’entrer dans la totalité / de la mort les yeux ouverts ». Tout cela est écrit dans une fort belle langue qui allie harmonieusement l’écriture théâtrale avec la poésie.