La narratrice reçoit une lettre, une lettre d’Amourond, l’ex-amour de sa vie. La lettre toujours cachetée, elle la considère longuement, prétexte à un retour vers le passé, au temps d’un couple qui se projetait encore dans l’avenir, de la recherche d’un prénom pour un enfant qui ne verra jamais le jour, de l’apprentissage de la jalousie, de la rupture amoureuse qui précède les habituels errements… Tour à tour, elle se souvient et réécrit l’histoire, nous prenant à témoin de cette tranche de vie et se mettant néanmoins à rêver « que la vie ne s’en tienne pas à l’œuvre de Bobin » !
Cynique ou rétive, déprimée ou survoltée, revancharde ou frivole, notre héroïne nous fait passer par toutes les étapes de sa digestion amoureuse où affleure toujours (il faut bien le dire) une certaine drôlerie. « Aujourd’hui, j’ai reçu des nouvelles de lui. Son adresse inscrite au coin gauche de l’enveloppe. Son adresse, à lui et Brigitte. Épaisse. La lettre. »
Marie, la copine, n’est pas la dernière à lui prodiguer de savoureux conseils : « T’attends quoi pour l’envoyer chier ? Quand est-ce que tu vas faire une femme de toi ? T’en as rien à crisser des nouvelles de lui ! Next ! […] Si tu chiales plus après ta voisine qui écoute tout le temps Garou dans l’tapis, si t’éclates plus de rire en voyant quelqu’un glisser sur le cul en plein hiver, pis que tu te crois plus quand t’annonces à tout le monde que tu vas arrêter de fumer, qu’est-ce que ça te donne d’avoir pris trente-cinq à pas te prendre au sérieux ? »
Malgré quelques facilités d’écriture, ce petit roman dans lequel bon nombre de lecteurs se retrouveront sûrement (car « nous sommes tous ego », précisément) reste très savoureux. Et la conclusion s’abat comme un coup de marteau du juge. Implacable mais salutaire