Ce roman s’ouvre sur un sommaire des comptes de Marc à son institution financière. Nous sommes le samedi 9 mai 2020 à Montréal. Sa marge de crédit déborde, ses cartes de crédit sont « maxées out ». Il n’a pas d’emploi, pas vraiment d’avenir. Que faire ?
Sur Grindr, il fait la connaissance de Marc-Antoine avec qui il vit une relation qui dépasse la simple aventure, mais qui se termine peut-être temporairement quand Marc-Antoine part pour un long voyage dont la destination et la durée sont vaporeuses.
Marc décide alors de retourner à Moncton, sa ville natale, et d’accepter l’emploi que sa sœur Carole lui a trouvé dans un « call center ». Le roman se termine quelques jours après le vendredi 19 février 2021 (date de la réception du sommaire des comptes). Sa situation financière s’est améliorée, il a pris conscience de son errance intérieure et entrevoit une (faible) lueur d’espoir.
L’intérêt du roman tient moins à l’intrigue, plutôt sommaire, qu’à la façon dont l’auteur raconte le cheminement de Marc. Gai assumé, usager fréquent de Grindr, Marc fait de nombreuses rencontres dont toutes, sauf celle de Marc-Antoine à Montréal, puis celle de Frédéric à Moncton, s’avèrent aussi courtes qu’insatisfaisantes.
Grindr n’est pas magique et, même si de nombreux textos parsèment l’ouvrage, la plupart ne mènent nulle part. Un peu comme si la vie de Marc pouvait se résumer à la sécheresse de ses SMS et à son besoin de satisfaire ses pulsions sexuelles. Cette utilisation systématique des textos reproduits dans un caractère distinct du texte principal et en préservant l’écriture particulière à ce mode de communication (les raccourcis et l’écriture phonétique notamment) crée le rythme du récit.
Parallèlement, la narration colle au quotidien du personnage : la vie avec sa sœur et ses deux enfants, le travail peu stimulant et répétitif, les bars et les rencontres. Seul Frédéric le sort de cette espèce de torpeur et l’incite à s’interroger, mais il ne reçoit qu’une réponse évasive : « J’sais pu… Une porte, une direction, de quoi de tangible, de sûr. Ju tanné d’pas savoir par où m’prendre, ju tanné d’faire la girouette, ju tanné d’attendre que ma vie starte ».
Qu’attendre, qu’espérer de la vie ? Marc ne peut que constater la vacuité dans laquelle il baigne. Il a fait des études universitaires, n’a jamais trouvé d’emplois satisfaisants et frôle la trentaine, si ce n’est un peu plus. Manifestement, il est perdu. On le suit dans sa dérive, dans son impossible quête de sens.
La qualité du roman tient à l’écriture incisive de Doucet, à la fluidité de ses dialogues, à la finesse de ses descriptions des états d’âme et du vécu de Marc. Le pianiste qu’est Doucet a su trouver la musicalité des mots. L’utilisation systématique du chiac colore les personnages, donne relief à leurs paroles et vie à Moncton.
Le titre n’exprime que très partiellement la quête de Marc. S’il est vrai que les dick pics peuvent représenter une partie de la réalité de son monde, ils ne sont en rien au centre du propos. Toutefois, le « sous les étoiles » correspond à l’absolu qu’il cherche. L’opposition entre les deux termes est sans doute volontaire, mais elle semble sous-entendre un érotisme sur lequel le texte n’insiste guère.