Déloger l’animal est le récit d’une autiste de 15 ans, Rose, qui voue un amour et une admiration profonde à sa mère. Lorsqu’elle ne doit pas aller à « l’école spéciale » où l’envoient ses parents, la jeune fille passe ses journées sur le toit de l’immeuble à s’occuper de ses lapins. Enfermée dans son monde, elle s’invente volontiers des vérités pour pallier au manque d’informations.
Parce qu’elle est surprotégée par ses parents, Rose vit dans une idéalisation de la réalité qui l’entoure. Bien sûr, elle n’en est pas dupe, mais joue le jeu avec plaisir, refusant de se laisser atteindre par la dureté de certaines vérités.
Lorsque sa mère disparaît mystérieusement, la tristesse et l’accablement poussent l’adolescente à chercher le vrai dans tout ce qui lui a été dit afin de découvrir pourquoi sa mère l’a quittée. Au fil de l’histoire, Rose tentera de lui inventer un passé avec le peu d’indices qu’elle trouvera.
Dans son nouveau roman, Véronique Ovaldé oppose la douceur de l’enfance à l’âpreté du monde adulte. En effet, jadis protégée de toutes parts par des améliorations de la réalité, Rose voit brusquement s’effondrer son univers. Elle cherchera à résister à l’infiltration de la médiocrité dans son existence. Elle découvrira ainsi les limites de l’imaginaire et devra se résoudre à quitter, petit à petit, le monde de l’enfance dans lequel elle s’isolait.
L’écriture de Véronique Ovaldé regorge de magnifiques images. Originales, celles-ci titillent autant le sens de l’odorat que les sens tactile ou visuel. Étant autiste, Rose s’amuse à décrire en détail des gestes et des éléments du quotidien, ce qui permet aux lecteurs de les voir d’un tout autre œil.
Le seul petit défaut se trouve dans le langage exploité par la narration : le niveau est beaucoup trop élevé pour une enfant de 15 ans qui ne semble ni lire, ni fréquenter des gens très cultivés. Il est évident que ce langage sert à la poésie du récit, mais il provoque une incohérence entre le personnage et la narration au « je » qui lui est attribuée.
Malgré tout, Déloger l’animal est un beau voyage à travers l’enfance et l’imagination, ainsi qu’une intéressante réflexion sur la surprotection des enfants, à qui l’on ment délibérément pour les « défendre » contre les difficultés de l’existence.