Malgré la pléthore de livres publiés depuis le 11 septembre 2001 sur l’islam et le monde arabe, les ouvrages rédigés par des experts québécois demeurent rares. Ceux de qualité, encore plus. L’ouvrage de Sami Aoun, professeur à l’Université de Sherbrooke et commentateur bien connu des médias électroniques, doit être salué.
Car l’universitaire nous fait entrer au cœur des (lourds) débats qui ont actuellement cours au sein du monde arabe et musulman. Certes, le propos ne sera pas toujours facile pour les néophytes. Cet avertissement posé, les enjeux soulevés sont de première importance pour comprendre le bouillonnement dans cette région. Sami Aoun y traite de la modernité, de la laïcité, de la démocratie, de la violence, de la condition de la femme, entre autres sujets qui alimentent les discussions et les réflexions sur le devenir de cet Orient encore si mal compris et son insertion, tant recherchée dans le cercle des nations dites développées, dans le bassin des pays alliés.
Une des principales conclusions de l’universitaire est que, pour le monde musulman, « l’accès à la modernité est devenu une nécessité historique pour faire partie du concert des nations, et son absence est la marque de sa vulnérabilité croissante ».
Un des vecteurs de cet accès au moderne est la laïcité, que favorise clairement l’auteur. Celui-ci fait un bel exposé des polémiques qui ont cours sur ce sujet crucial dans le monde musulman. À raison, Sami Aoun rappelle que ces débats, qui portent aussi sur les droits de l’homme, la place de la femme, etc., ont encore beaucoup de difficultés à se sortir du « référentiel religieux » et de la comparaison, voire de la confrontation, avec l’Occident. Ce qui bloque encore l’émergence d’une pensée « libre ». Un espoir ? Il réside notamment chez les élites arabe et musulmane de la diaspora, qui sont à même de faire cette « synthèse historique » pacifiée avec un lourd passé religieux et les valeurs modernes de tolérance.