Le titre de l’ouvrage de Jeanne Valois piquera sans doute la curiosité de quelques-uns. L’intention de l’auteure est pourtant moins polémique que pédagogique. Valois présente un rapide survol de dix siècles d’histoire médiévale, en adoptant toutefois une perspective particulière : l’évolution des rapports entre le spirituel et le temporel.
Conforme au principe de vulgarisation, cet essai propose néanmoins une importante quantité d’informations sur les conditions de l’émergence et du développement des relations entre l’Église et le reste de la société médiévale. Jeanne Valois parvient notamment à mettre assez efficacement en évidence l’ambiguïté du clergé, affirmant la primauté du spirituel tout en s’imposant comme un acteur économique et financier incontournable. Il est particulièrement intéressant de découvrir comment les plus éminents théologiens (dont Thomas d’Aquin) ont tenté de concilier la foi et la raison (pratique). La compromission de l’Église a cependant suscité de nombreuses controverses et sera l’une des causes de la Réforme. Évidemment, on ne cherchera pas un exposé détaillé de tous ces faits dans Au nom de Dieu et du Profit, car l’essai ne prétend pas à l’exhaustivité. Notons qu’une bibliographie permet d’ailleurs aux lecteurs d’approfondir telle ou telle question.
On demeure sceptique, en revanche, lorsque l’auteure tente de nous convaincre de la pertinence « d’appliquer cette tranche du passé à notre société actuelle, pour ne pas dire distincte ». De même, il est discutable d’identifier le royaume des Francs comme origine d’une « nouvelle civilisation originale, la nôtre ». Sans renier un passé européen, il semble difficile de ne pas considérer l’existence et la singularité de la société québécoise sans prendre en compte son rapport au continent américain (particulièrement quand Québec est l’hôte du Sommet des Amériques !). Contrainte, dans un bref épilogue, de survoler l’histoire de la Nouvelle-France, Jeanne Valois parvient néanmoins à montrer l’implication de l’Église catholique dans la vie économique de la province jusqu’à la Révolution tranquille.