Professeur de paragrapheest le troisième roman de France Boisvert, aussi auteure de recueils de nouvelles et de poésie. Également enseignante de français et de littérature depuis une trentaine d’années, elle a probablement emprunté certains traits de caractère de ses personnages aux collègues qu’elle a côtoyés. Cependant, le titre de l’ouvrage, me semble-t-il, ne donne pas une idée juste de la personnalité de son héros. Il évoque un maître pointilleux, intransigeant sur la forme que l’étudiant doit respecter, alors que Maurice Lecamp ne ressemble nullement à cette image stéréotypée.
Lorsqu’il s’agit d’un écrivain, il est nécessaire de faire la distinction entre l’homme et l’œuvre. L’œuvre de Maurice Lecamp n’est pas sa thèse sur Marguerite Duras, qui s’empoussière dans une bibliothèque, c’est son enseignement. Or, celui-ci est d’une qualité exceptionnelle. Bien que le professeur approche l’âge de la retraite, il n’a rien perdu de son dynamisme. II soigne sa tenue comme un acteur qui s’apprête à donner un spectacle. Ses étudiants sont suspendus à ses lèvres au point qu’ils en oublient de prendre des notes et ils sont les derniers à sortir du cégep. Jean-François Laforêt, un Algonquin schizophrène, vient lui dire qu’il aime son cours. Son cahier étant couvert de signes indéchiffrables, Maurice Lecamp lui demande de le lui lire et, « miracle de l’oralité », il découvre alors un texte excellent et lui met 5 sur 5.
Si le professeur est parfaitement à l’aise avec les jeunes, l’homme a beaucoup de difficultés dans ses rapports avec les adultes. Son mariage « bat de l’aile », la pomme de discorde étant le dictionnaire rectifié auquel travaille sa femme. Pour l’amoureux de la langue française qu’est Maurice Lecamp, le fait de transformer « nénuphar » en « nénufar » est une hérésie. Quand sa fille vient de Vancouver passer quelques jours chez lui avec son mari et son bébé, en l’absence de son épouse, il a hâte de les voir partir. Même si l’auteure se réclame de Cioran, qui considère que « la pourriture » intérieure est le signe distinctif de l’humanité, ce sont les hommes qu’elle représente comme les plus pourris : voleurs, volages, violents.
Les mésaventures de Maurice Lecamp se multiplient au cours de l’année scolaire, à tel point que celui-ci se demande s’il va prendre sa retraite à la rentrée.
Ce roman plaira assurément aux professeurs de français et de littérature à qui France Boisvert l’a dédié, mais aussi à tous ceux qui ont gardé un bon souvenir de leurs études dans un cégep et aux lecteurs férus de littérature. Le récit ne manque pas de rebondissements et le style – caustique – est enrichi par une multitude de références implicites et de jeux de mots.
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