En peu de pages, l’auteure effectue une solide exploration d’un aspect controversé de la vie montréalaise : la présence et l’expansion de communautés juives ultra-orthodoxes. Sans jamais verser dans le pittoresque-à-tout-prix, Sandrine Malarde décrit et s’efforce de comprendre le farouche isolement de milliers d’hassidim. Sa méthode, comme le révèle le titre du livre, consiste à voir les hassidim depuis leur intérieur au lieu de les réduire en objets de voyeurisme : leur vie secrète importe plus que leur vêture.
Malgré la tendance centrifuge de beaucoup d’univers religieux marginaux, un objectif rattache les diverses tendances de cette communauté : « […] les juifs ultra-orthodoxes ont tous en commun le souci de ne pas s’assimiler à la société séculière ». Non seulement les hassidim réduisent le plus possible les contacts avec l’extérieur, mais ils tiennent à vivre même entre eux sans imiter les mœurs de l’extérieur. Ainsi, ils interdisent aux leurs la mixité que pratique et encourage la société ambiante : garçons et filles hassidim grandissent sans se connaître. Pareille exigence, sur laquelle insiste Sandrine Malarde, a rarement attiré l’attention jusqu’à maintenant ; elle révèle pourtant que les hassidim s’isolent non pas surtout de l’Autre, mais d’un mode de vie échappant à la religion.
Autre mérite de ce livre, il cerne avec soin ce que sont les accommodements raisonnables. « […] le terme ‘accommodement raisonnable’ a été largement galvaudé, la surexploitation médiatique excessive du sujet n’ayant pas aidé ». Au lieu de dénoncer telle concession consentie au nom du vivre-ensemble, Sandrine Malarde rappelle la véritable nature de l’accommodement raisonnable : « […] il faut qu’un individu soit victime de discrimination ». Situation peu fréquente. La précision, absente du plaidoyer par ailleurs solide de Caroline Fourest (Génie de la laïcité, Grasset, 2016), désamorce les assauts du simplisme.
Le secret de la démarche ? « Si j’ai pu mieux comprendre le monde à part des hassidim, écrit l’auteure, c’est par la porte de sortie que j’ai pu le faire. » Autrement dit, grâce aux témoignages d’individus issus du monde hassidim et désormais affranchis de son influence. Ne sont-ils pas les seuls à connaître les deux mondes ?
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