Gatien Lapointe (1931-1983) est surtout connu pour son magnifique recueil L’ode au Saint-Laurent publié en 1963, dont on a souvent dit qu’il amorçait un mouvement de prise de parole nationaliste. Mais ces considérations politiques ont longtemps voilé la beauté et l’universalité de ce livre. Un être est jeté dans le monde et parle de son attachement à la terre, de ses désirs de transcendance, de ses espérances, d’un avenir où la mort serait abolie. Avec ce recueil, mais aussi avec Arbre-radar paru une vingtaine d’années plus tard, Lapointe s’est logé non pas parmi les grands poètes nationalistes, mais parmi les grands poètes tout court.
« Le monde se suicide en chaque homme », écrit Lapointe dans « Au plus clair de l’été », l’un des « poèmes retrouvés » par Jacques Paquin. Ainsi, est-ce de la même façon qu’il faut lire ce recueil posthume, en en appréciant la profondeur d’une expérience humaine révélée par l’écriture. Oui, sans doute, les poèmes réunis dans ce livre n’ont pas tous la force des textes célébrés par l’histoire – par exemple, les premiers au ton élégiaque datant des années 1950 –, mais on y trouve presque à chaque instant la fureur de vivre qui animait le poète. Et parfois, des vers d’une puissance émouvante : « Dieu je ne peux que mourir / et j’avais toute l’immortalité d’un homme ». Il y est question de l’homme, d’un homme, constamment menacé par une mort obsédante, mais qui trouve dans la brièveté même de l’existence le sens de chacun de ces actes. Le poète signe ici son appartenance à la nature – arbres, oiseaux, animaux – avec qui il partage le même destin, bien qu’il soit « encore plus seul qu’une bête ».
Poèmes retrouvés contient tous les poèmes de l’auteur publiés en revue ainsi que des inédits, dont quelques textes posthumes. C’est l’occasion d’entrer dans l’œuvre en devenir, là où « l’eau du poème s’apprête à jaillir ».
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