Prix du Gouverneur général 2016 – Traduction
Voici un autre « livre noir du Canada anglais », pour paraphraser le réquisitoire de Normand Lester paru aux Intouchables. Cette fois, il y est question du sort réservé aux nations autochtones de l’Ouest canadien, victimes non seulement de l’acculturation causée par les réseaux de pensionnats forçant leur scolarisation, mais aussi des épidémies successives dont plusieurs tribus ont été fatalement atteintes au cours des XVIIIe et XIXe siècles. D’entrée de jeu, l’historien James Daschuk admet que de nombreuses maladies existaient en Amérique avant l’arrivée des premiers explorateurs européens : « hépatite, poliomyélite, parasites intestinaux, encéphalite, arthrite, pinta, maladie de Chagas, leishmaniose ». Mais la rencontre de deux mondes jusqu’alors parallèles allait ajouter un lot de maux inconnus sur le sol d’Amérique, causant la disparition de plusieurs nations vulnérables. Cependant, les politiques du gouvernement fédéral allaient accélérer cette hécatombe. Si le mépris du premier ministre John A. Macdonald envers Louis Riel et les francophones reste bien connu, son racisme envers les Premières Nations était encore plus virulent, comme l’affirme James Daschuk : « […] la stratégie mise en œuvre par Macdonald pour affamer les Indiens réfractaires et les contraindre à la soumission et aux réserves était sans doute cruelle ; elle ne s’en révèle pas moins efficace ».
L’auteur décrit les innombrables maladies dont les Autochtones de l’Alberta étaient atteints à la fin du XIXe siècle, par exemple la tuberculose, la consomption et la scrofule, « une maladie environnementale causée par la piètre alimentation, le manque de ventilation et de lumière et l’insuffisance des mesures d’hygiène chez les malades ».
Richement documenté, La destruction des Indiens des Plaines offre une explication au désarroi et à la perte de repères de tant d’Autochtones. En dépit d’un sujet difficile, la traduction de Catherine Ego est fluide et sans lourdeur. La version anglaise (Clearing the Plains: Disease, Politics of Starvation, and the Loss of Aboriginal Life, University of Regina Press, 2013) a reçu le Prix d’histoire du Gouverneur général du Canada en 2014. Ironie suprême, cette récompense prestigieuse décernée pour la recherche savante porte le nom du pire persécuteur des Autochtones : le Prix Sir-John-A.-MacDonald.
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