Le livre imite la course à relais : Andrée Ferretti présente sa préfacière Djemila Benhabib qui présente Andrée Ferretti avant que Fannie Bélanger-Lemay raconte Andrée Ferretti… La démarche étonne un peu, mais le profil d’Andrée Ferretti en ressort finement nuancé.
L’hommage de la préfacière confirme le connu, mais en ajoutant la chaleur de l’amitié. Libre, exigeante, pressante, telle est Andrée Ferretti. Jouir de son amitié est un privilège que savoure Djemila Benhabib : n’entre pas qui veut dans ce cénacle.
Les textes que regroupe ici Andrée Ferretti (dont certains sont parus dans Nuit blanche) témoignent de sa polyvalence. Volontiers portraitiste, elle recherche en chaque être la facette qui justifie, selon les cas, l’admiration, la réserve, l’osmose des perspectives. Maurice Séguin, Gaston Miron, Hélène Pedneault, Louky Bersianik font aisément l’unanimité ; d’autres non.
Les deux intermèdes éclaireront cette polyvalence. L’intermède philosophique, dominé par le culte que porte Andrée Ferretti à Spinoza, explique peut-être l’irrépressible besoin de liberté que tous et toutes observent et respectent chez celle qui est devenue la fervente disciple de ce philosophe. Spinoza s’en remet avec une telle confiance à l’être humain qu’il n’éprouve aucun besoin de transcendance : « Lorsque les humains, dans leur évolution, en arriveront à établir des rapports d’intelligence plutôt que des rapports de force, ils pourront juger de la valeur de ce qui est bon ou mauvais à la joie intérieure qu’ils éprouveront à agir, à penser, à entrer en relation ». Donc, nul besoin d’endosseur surnaturel. Peut-être ce pari sur Spinoza conduit-il à la chaleureuse réhabilitation de l’amour humain qu’effectue ensuite l’intermède anthropologique.
La postface que signe Fannie Bélanger-Lemay couronne à merveille ce passage du témoin d’une main à l’autre. Deux réflexions particulièrement pertinentes y font surface. D’une part, comment susciter le désir de liberté chez quelqu’un qui ne l’éprouve pas ? « Chez Ferretti, la tension existe et elle est montrée, mais elle ne trouve pas de solution satisfaisante ». D’autre part, le combat pour l’indépendance inclut désormais chez Ferretti, plus clairement qu’au départ, « une lutte pour une révolution sociale complète ». Deux observations capitales.
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