Dix-sept auteurs, dont six avec plus d’une contribution, font le point sur l’état de la Nouvelle-France avant et après le traité de Paris en abordant différents sujets qui vont des alliances amérindiennes aux négociations diplomatiques entre la France et l’Angleterre, en passant par les rivalités commerciales dans la traite des fourrures, les droits de pêche, le remboursement de la monnaie de papier, le sort de la population canadienne, de l’Église catholique, du régime seigneurial…
Il faut souligner d’entrée de jeu l’éclairante introduction de Laurent Veyssière qui, en un peu plus d’une vingtaine de pages, brosse le tableau de la situation qui prévalait dans les nombreux pays touchés par la guerre de Sept Ans (1756-1763), à laquelle le traité de Paris, signé le 10 février 1763, venait mettre un terme. Veyssière remonte aux nombreuses ententes élaborées entre les nations européennes, dont le traité d’Utrecht en 1713, et replace la Conquête de la Nouvelle-France dans son contexte global afin d’en apprécier l’importance relative. Il y expose la logique du principe d’équilibre des puissances en présence, les gains territoriaux temporaires comme monnaie d’échange en vue des négociations à venir, les renversements de coalitions, l’action des hommes politiques de premier plan (par exemple, George III et William Pitt en Angleterre, Louis XV et le comte de Choiseul en France) et le bilan économique de la guerre.
Cette description des volets européen et américain du conflit, également examinés par Michel De Waele dans son chapitre, éclaire les collaborations suivantes qui traitent de questions plus circonstancielles, tels l’apport démographique des soldats de Montcalm (Marcel Fournier), « l’amérindianité » comme composante fondamentale de l’identité canadienne-française (Denis Vaugeois), la morue comme moteur de l’exploration européenne de l’Amérique du Nord au XVIe siècle (Raymonde Litalien), le Canada comme espace économique marginal dans l’empire colonial français (Didier Poton), la liquidation de l’immense dette du Canada (Sophie Imbeault), la guerre du chef Pontiac dans les Pays d’en Haut (Joseph Gagné), l’intégration sociale des Canadiens passés en France à la Conquête (Robert Larin)… D’autres auteurs se penchent sur les fastueuses fêtes entourant la publication de la paix en France (Alain Laberge), la guerre à la sauvage (Laurent Veyssière), l’originalité de l’approche de Lionel Groulx dans ses Lendemains de conquête (1920) (Charles-Philippe Courtois), la réconciliation des élites britanniques et canadiennes et la prestation obligatoire du Serment du Test (Donald Fyson), la signification de la Conquête pour les Autochtones (Alain Beaulieu), le changement des habitudes alimentaires des habitants (Yvon Desloges), les pratiques culturelles (Laurent Turcot)…
Un fort utile index est précédé d’une chronologie ample et détaillée par Sophie Imbeault, qui couvre avec circonspection la période allant du traité d’Utrecht (1713) à l’Acte de Québec (1774). L’essai ne comporte pas de bibliographie comme telle mais chaque article est accompagné de notes infrapaginales donnant la référence à une imposante quantité de livres et de documents d’archives, en anglais comme en français. Trente-deux pages, dont la grande majorité en couleurs, illustrent au surplus ce riche ensemble de textes.