Voici un petit livre qui, sans jamais atteindre la densité des « grands » romans, ni leur ampleur, trouvera par la rigueur de son style et la réflexion qu’il suscite son lot de lecteurs. On en aurait voulu un peu plus, il est vrai, tant sont aérées les pages. En fait, ce petit livre tient plus de la longue nouvelle que du roman. Il en a en outre le caractère elliptique, les personnages et le décor à peine esquissés mais bien campés, l’élément perturbateur, la fin inattendue.
L’offense raconte la « maladie » du jeune tailleur Kurt Crüwell enrôlé dans l’armée allemande au début de la Seconde Guerre mondiale. S’il supporte difficilement l’esprit national-socialiste, il trouve un certain plaisir dans l’exil. Les villes étrangères tombées sous le drapeau ennemi le ravissent, il s’enivre d’architecture, de livres, jusqu’à en oublier la réalité de la guerre. Mais un jour qui arrive trop vite, il est témoin d’une scène atroce ‘ les habitants d’un village français brûlés vifs dans leur église ‘ et son corps dit alors non. Il ne répondra plus ni au froid, ni à la douleur, ni même à la tendresse.
L’auteur, Ricardo Menéndez Salmón, est de toute évidence épris de philosophie, et l’on se délecte de ses réflexions sur la mémoire et sur les traumatismes de la guerre. Un petit livre donc, mais un livre d’une maturité certaine.