Stephen King est un écrivain plein de ressources, tenace et qui respecte son fidèle lecteur, se confie à lui. En effet, comme c’est le cas dans plusieurs de ses ouvrages, il nous invite ‘ au moyen d’un prologue, d’une introduction ‘, à tenter de comprendre son processus de création. Composé de treize nouvelles et paraissant à la suite du somptueux Duma Key (Albin Michel, 2009), Juste avant le crépuscule est issu d’un travail d’édition que King a réalisé en 2006 pour la série annuelle Best American Short Stories dont il avait à assumer la direction littéraire en tant qu’« éditeur invité ». C’est en parcourant des centaines de nouvelles qu’a germé en lui l’idée de ce recueil, s’inspirant, nous dit-il, de son écriture dite à l’« ancienne manière » (pensons à l’incontournable Night Shift paru chez New American Library en 1979). L’écriture de ces histoires s’étend d’environ 2002 à 2008 ; certaines ayant déjà été publiées et, ici, retravaillées mais sans toujours, hélas, montrer cette fameuse ancienne manière… Cependant, l’ensemble se tient très bien.
C’est dire que l’art de Stephen King a forcément évolué avec des effets de sens beaucoup moins juvéniles que par le passé, mais avec, parfois, des moments de réelle horreur plus raffinés, quoique… Sa conception du fantastique apparaît ainsi beaucoup plus stylisée, sa « voix » n’est plus tout à fait la même depuis le début du présent millénaire : son écriture est plus subtile à bien des égards et empreinte d’un très fort pouvoir d’évocation qui, par moments, étonne réellement. On pensera à la nouvelle intitulée « N. », à saveur lovecraftienne et assez dérangeante.
Encore une fois, les inconditionnels du maître de l’horreur seront ravis même s’ils regretteront sûrement le fantastique-horreur de Shining (Alta, 1979) ou l’inquiétante étrangeté de Misery (Albin Michel, 1989). À la toute fin de l’ouvrage, King nous confie : « Et là-dessus, je vous fais mes adieux, au moins pour le moment. Si les miracles continuent à se produire, nous nous retrouverons ».
Pour le meilleur et pour le pire… mais toujours avec la même anticipation ludique pour qui est sensible à cette aventure littéraire qu’est le fantastique comme révélateur des zones obscures de l’être.