La poésie québécoise, Des origines à nos jours est devenu un passage obligé en poésie. Les lecteurs, nombreux, qui possèdent l’édition antérieure datant de 1986 (ou de 1990) devront à tout prix se procurer la nouvelle, revue et grandement augmentée. Sans se débarrasser de l’ancienne. Car, malheureusement, comme beaucoup de choses dans la vie, certains poèmes ont vu leur vie (publique) écourtée.
Dans leur premier regroupement, les anthologistes Pierre Nepveu et Laurent Mailhot, bien de leur temps, avaient fait une large place à une poésie plus hermétique et formaliste, une esthétique qui se révélera un peu moins importante vingt ans plus tard. On regrettera ou non les noms de Jean-Yves Collette, Michel Gay ou Jean-Michel Valiquette, mort à 19 ans, dont l’œuvre, « rageuse et visionnaire », disait-on, était « annonciatrice des nouveaux courants de la poésie québécoise qui se sont développés à partir de 1970 ». De René-Louis Chartier de Lotbinière, auteur du « premier poème écrit par quelqu’un qui a fait ses études au Canada », à André Beaudet, qui incarna la modernité rationaliste québécoise, ils sont une vingtaine de poètes à être effacés de cette petite histoire. À cet égard, la suppression de Michèle Lalonde et de son « Speak White » est discutable. Même si ce poème, d’un point de vue idéal, n’a pas une valeur hautement esthétique, il a marqué au moins une génération de lecteurs, sinon plusieurs. Plus compréhensible est la disparition de Jacques Godbout poète, un auteur surtout apprécié pour ses romans et ses essais.
On enlève pour ajouter. Et malgré tous ces retraits, une centaine de pages viennent augmenter l’épaisseur d’un livre déjà volumineux. Les premiers noms nouveaux, selon leur date de naissance : Éléonore Sioui (1925), première Huronne-Wendat à publier un recueil au Québec, Anthony Phelps (1928), né à Port-au-Prince, et D. G. Jones (1929), originaire de l’Ontario. On le voit, la notion de « poésie québécoise » s’est élargie depuis les années 1980. Par ailleurs, quelques « oublis » ont enfin droit de figurer sur la liste des élus. On nommera Louky Bersianik, une voix importante de l’écriture féminine (ou féministe) au Québec, et Denise Desautels.
Les autres, ils sont une quarantaine, jeunes poètes et moins jeunes, dont l’œuvre a marqué plus récemment le genre. On pourrait déplorer quelques absences. Mais seul le temps nous dira si une Kim Doré, un Louis-Jean Thibault ou une Tania Langlais étaient de meilleurs choix qu’un Mario Brassard, un Jean-Simon DesRochers ou un Tony Tremblay.