C’est peu dire que le livre de Charles C. Mann bouscule nos idées sur l’histoire des premiers habitants des Amériques. Que ce soit en regard de l’évaluation de leur nombre, du moment où les premiers hommes ont franchi le détroit de Béring pour peupler le continent et du niveau de civilisation atteint par certains de ces groupes, 1491, Nouvelles révélations sur les Amériques avant Christophe Colomb met à mal à peu près tout ce qui s’est dit sur ces questions depuis des siècles.
Par exemple, les Amériques auraient été considérablement plus peuplées que l’Europe à la même époque, comptant peut-être jusqu’à 200 millions d’habitants (et même plus) avant le débarquement de Colomb sur l’île d’Hispaniola (Haïti) en 1492. En outre, les derniers travaux en matière de datation font remonter si loin dans le temps le peuplement des Amériques que l’éclosion des grandes civilisations amérindiennes (totalement endogènes, précisons-le) précéderait de beaucoup l’apparition de leurs équivalents en Europe.
Comment alors une poignée de conquérants ont-ils pu s’emparer d’un continent densément peuplé et très avancé sur les plans technologique et scientifique ? De plus en plus de chercheurs soutiennent l’hypothèse que des épidémies virales telles la variole et l’hépatite auraient tué, en quelques années seulement, l’immense majorité de la population autochtone (on parle de 95 % et même de 98 % de morts) avantque les Européens ne s’établissent durablement sur les rivages du Nouveau Monde. Les conquérants n’auraient eu affaire qu’aux survivants de la pire hécatombe de l’histoire de l’humanité.
S’appuyant sur les percées les plus récentes en matière d’archéologie, d’anthropologie, de biologie et d’histoire dont l’auteur fait une brillante synthèse, 1491, Nouvelles révélations sur les Amériques avant Christophe Colomb se lit comme une enquête qui nous promène aux quatre coins du continent, aussi bien sur les sites archéologiques des plateaux andins que dans le Mexique des Mayas, des Olmèques ou des Aztèques ou sur les sites des peuplements algonquin et iroquois de la Nouvelle-Angleterre. Avec le talent d’un grand vulgarisateur et le savoir d’un fin connaisseur, Charles C. Mann croise les données scientifiques les plus récentes pour esquisser le véritable portrait des peuples qui ont arpenté les Amériques précolombiennes. Au final, un tableau qui montre souvent l’exact contraire de ce que l’on croyait jusqu’ici.