Avec l’ouverture des travaux de la commission Bouchard-Taylor sur les accommodements raisonnables, paraît cet ouvrage qui donne un point de vue intelligent et documenté sur ce sujet combien sensible.
La contribution est d’autant appréciée qu’elle vient d’une immigrante d’origine égyptienne, bien intégrée au Québec, et déjà connue pour un récent ouvrage critique sur le voile islamique.
Comme le titre l’indique, l’auteure est réticente à avancer trop loin dans la voie des compromis en faveur des signes religieux, entre autres. Elle y voit une certaine dérive, malencontreusement appuyée par notre système juridique actuel, qui penche nettement pour la reconnaissance de l’expression des différences plutôt que pour un vouloir-vivre collectif.
Yolande Geadah ne fait pas reposer son argumentation sur une vision émotive (comme cela est trop souvent le cas autour de cet enjeu), mais bel et bien sur le terrain juridique et social. Récusant la logique très individualiste des chartes des droits, elle prône l’intégration, à différencier de l’assimilation qui suppose implicitement la « supériorité » d’un modèle culturel sur un autre. L’intégration amène peut-être « l’abandon de certaines valeurs et pratiques traditionnelles » qui s’expriment avec force sur la place publique, mais convient mieux à une société laïque cherchant à établir des ponts entre les cultures, et non à accentuer les différences.
Elle recommande donc de sortir de l’« enfermement identitaire » que pose l’enjeu des accommodements raisonnables, pour adopter et appliquer des règles laïques plus claires, notamment en ce qui concerne le droit à l’égalité des sexes. Un modèle plus proche de celui de la France, pourrait-on lui rétorquer, mais en même temps probablement beaucoup plus lié aux aspirations québécoises.