La poésie russe contemporaine – nommée « post-soviétique » dans l’introduction de cette anthologie -, émerge, nous dit-on, de l’agonie ainsi que de la désagrégation finale du marxisme soviétique. Evgueni Bounimovitch nous présente, conséquemment, deux « vagues » poétiques incarnées par deux générations spécifiques : celle du début des années cinquante et celle qui a vu le jour à l’aube des années soixante-dix.
La première sera représentée par ceux et celles qui ont écrit durant cette agonie du mythe de l’URSS, tandis que la deuxième nous offre une culture « autre », « parallèle », plus contemporaine, « postmoderne » et éclatée, difficile à cerner, même si on a pu la nommer génération « Babylone », du nom du groupement poétique le plus connu. « Babylone est plus qu’un groupe, c’est aussi une métaphore assez exacte : à la suite de la désintégration du pays et de son espace idéologique, les langages poétiques les plus différents ont désormais droit presque égal de cité dans la Russie actuelle. »
La nouvelle poésie russe nous fait connaître trente-trois créateurs et créatrices ; les textes de chacun sont précédés d’une brève note biographique : c’est donc tout un panorama que l’on est amené à considérer. Les thématiques ou horizons explorés par les deux générations sont multiples : on a pu parler de tenants du métamétaphorisme, du conceptualisme et du polyslisme ! Comme l’a écrit à ce propos Vlikhail Aïzenberg, l’un des poètes dits de la seconde vague : « Il s’agit d’une tentative de coexistence et d’influence mutuelle du divergent plutôt que d’une multiplication du semblable ». Toujours est-il que la nouvelle poésie russe semble tout autant parlante que celles dites de l’« âge d’or »(Pouchkine) ou de l’« âge d’argent » (Maïakovski), tout en étant, évidemment, excessivement éloignée de la poésie soviétique officielle de naguère…