Rendre compte du cheminement parfois méandreux de l’éducation en terre québécoise et, plus encore, le faire en moins de 200 petites pages, cela tient de l’exploit. Pour parvenir à ce résultat, Pierre Graveline, il est vrai, pouvait puiser dans le savoir et les réflexions accumulés au cours de ses années au sein du syndicalisme enseignant, mais cela, en raison d’une excessive familiarité, risquait aussi de jouer contre lui. Il arrive que « qui connaît trop bien châtie mal ». Avantages retenus et inconvénients écartés : Pierre Graveline dégage sans état d’âme les articulations des systèmes (ou les absences de système) qui se sont succédé, synthétise sobrement les points de vue et les enjeux, se tient à sereine distance des querelles byzantines, du culte des personnalités et des partis pris des diverses orthodoxies. La lecture file sans hargne ni règlement de compte même posthume et le survol laisse des repères précis, fiables, éclairants.
On n’en voudra donc pas trop à Pierre Graveline s’il introduit un peu aisément dans l’histoire de l’éducation une distinction pas toujours patente entre corporatisme et syndicalisme. Toujours souhaitable, la différence n’est pas constamment visible. On regrettera un peu davantage, parce que l’avenir plus encore que le présent en dépend, que soit si laconique le bilan de l’auteur quant au rôle rempli (?) par les facultés des sciences de l’éducation depuis qu’elles ont succédé aux défuntes écoles normales. Autant Pierre Graveline a raison de rappeler que la performance des anciennes écoles normales variait d’un établissement à l’autre, autant on aurait aimé qu’un spécialiste comme lui scrute de près la performance de l’université en matière de formation des maîtres.
Bilan succinct, clair, indispensable pour quiconque souhaite en savoir beaucoup sur nos origines pédagogiques et accueillir d’un œil critique les réactions épidermiques des médias.