À examiner les textes et dessins qu’on doit à Albert Ferland, on partage bientôt l’admiration des auteurs et des collectionneurs qui lui rendent hommage : étonnante polyvalence, en effet, que celle-là. Albert Ferland touche à tout, passant non seulement d’une technique artistique à l’autre, mais d’un genre littéraire à son cousin ou à son parent éloigné. Il versifie, photographie, dessine, se fait préfacier ou portraitiste, libraire ou enlumineur. Il invente même, pour faire des photographies la base de ses superbes portraits ou pour en tirer un sidérant profil de Montréal, des astuces dont on chercherait vainement, je pense, des précédents. Toujours mobile, souvent inquiet, il passera même, comme s’il modifiait son éclairage, de l’indifférence religieuse à une foi soupçonneuse et intolérante. D’où un élagage des portraits, dont souffrira, par exemple, Papineau.
Il ne s’agit pourtant pas d’une soumission d’Albert Ferland au passage des modes. Quand il illustre le recueil de Léonise Valois, il contribue à la naissance d’une littérature féminine, mais peut-être n’en prend-il même pas conscience. Quand il s’initie à la culture amérindienne ou inuite, au point d’utiliser presque un siècle d’avance le vocabulaire plus respectueux que notre époque pense avoir découvert, il n’est que lui-même, lui-même tout simplement. De même, il n’écoute que sa sensibilité quand il louange les ouaouarons comme d’autres encenseraient les muses ou quand il se lie d’amitié avec les bouleaux. Au fil des pages et des rappels, on constate qu’il mérita en son temps l’amitié, l’estime, parfois même l’admiration de Marie-Victorin, de Louis Fréchette et cie. Belles (et diverses) références.
Choix discutable de l’édition, la plupart des textes et des dessins sont présentés sur fond gris. Peut-être était-ce imposé par l’état des documents ; chose certaine, la lisibilité y perd.